Sans faire de bruit, Barrueco s'est construit en 14 ans de carrière un bon petit curriculum vitae dans l'impitoyable industrie musicale. D'abord batteur au sein de groupes estampillés rock (Kaysong) et blues (Blues n'co), l'artiste s'est mis à la guitare. Son expérience, il la puise en passant notamment par un stage d'écriture aux rencontres d'Astaffort (chez Francis Cabrel). La conception d'un double album "Face A/Face B" sorti en 2012 et d'un EP ("Etre hum'Un" en 2015) marque ainsi un peu plus son ancrage dans un style pop épuré, acoustique, citant au passage des influences telles que Coldplay, U2 ou encore Starsailor.
Sobrement intitulé "Barruec'Hope", l'album, à la pochette qui pourrait faire penser à un disque pour enfants, ne galvaude pas son titre. Barrueco, guitare sèche en proue, a voulu mettre en avant l'humain, la fraternité et faire un album positif et lumineux. Le premier titre, éponyme, pose les bases de ce que sera l'album avec ses sept minutes au compteur, rares pour une chanson pop française à l'heure actuelle. La mélodie démarre sur de jolis arpèges de guitare accompagnant des paroles un peu naïves, pleines de candeur. Le morceau prend le temps de se développer, Barrueco ajoutant avec une douce parcimonie des notes de piano et quelques cordes discrètes pour arriver à un final explosif avec la présence d'une chorale qui permet à 'Hope' de prendre de la hauteur avec un petit côté lyrique. Si on s'éloigne un peu de Coldplay, ce début d'album fait plus penser à Paul Simon, voire pour le côté français à un Alain Souchon dans son versant positif ('Douce Heure').
Si on ne peut aller jusqu'à qualifier Barrueco d'artiste engagé, il est à tout point de vue bien concerné par ce qui l'entoure. Même si les paroles ont un petit côté simpliste, il faut lui reconnaître qu'il assume le fait de parler de certains faits sociétaux avec un brin de poésie. Parmi les morceaux les plus réussis peuvent être cités 'A la Gloire de la Vie', qui tire son épingle du jeu avec son léger côté bossa nova qui contraste avec les paroles un peu tristes, le slam à la Grand Corps Malade du très beau 'Il Ne Nous Reste Pas Rien', avec son violoncelle qui apporte une belle gravité (le texte est lié aux attentats du Bataclan), ou 'Podémos' qui prend le relais de façon plus symphonique et en partie clamé en espagnol lui donnant une force presque révolutionnaire. Enfin, Barrueco lorgne presque vers le progressif (oui vous lisez bien) avec le superbe 'Rêve Debout' qui ose le mélange des genres avec le slam, le symphonique et l'épique et dans lequel des breaks un peu abrupts se succèdent, accentuant ainsi le côté théâtral du titre.
Cependant "Barruec'Hope" n'est pas exempt de défauts avec notamment un 'Jeunesse' qui dénote un peu par rapport au reste de l'album en lorgnant trop vers le Coldplay de ces dernières années, les quelques effets sur la voix ternissant le titre. Toutefois, il ne gâche pas le plaisir que l'on ressent à l'écoute de cet album et a le mérite d'essayer d'apporter un peu de variété à l'album.
Bien pensé et construit, attachant par son côté candide et positif, "Barruec'Hope" apporte, avec sa base un peu folk et symphonique, un brin de fraîcheur à une pop française qui s'enlise dans des hits formatés ou dans des titres usant de thèmes plus abstraits qui souvent finissent par ne plus rien dire. Barrueco appelle à la fraternité dans un album au final très beau, ambitieux et risqué dans le paysage musical actuel.