Peut-être Tuomas Saukkonen a-t-il compris que Wolfheart, dont il est l'âme fondatrice, commençait à tourner quelque peu en rond avec "Tyhjyys" et son air tenace de déjà-entendu ailleurs, chez "Shadow World", son prédécesseur notamment et ce, nonobstant une qualité d'écriture comme d'exécution aussi immuable qu'incontestable.
Le fait est que "Constellation Of The Black Light" surprend agréablement, au moins pour partie (nous y reviendrons). Non pas que le groupe ait décidé de se départir de ce death nimbé de mélodies gelées et forestières, et donc typiquement finlandais, dont il est un des artisans les plus efficaces, mais en embrayant d'emblée avec une pièce longue de dix minutes, il rompt avec le patron qui lui servait depuis l'inaugural "Winterborn". 'Everlasting Fall' n'est pas seulement le titre le plus étiré jamais composé par Saukkonnen et ses comparses, il s'agit avant tout de l'une de leurs plus belles créations.
Dressant avec fermeté les couleurs d'une inspiration nocturne et hivernale, les Scandinaves nous entraînent dans un périple épique vibrant d'une emphase crépusculaire. Aux arpèges boisés qui étendent tout d'abord un suaire mélancolique, succèdent des guitares gonflées d'une beauté ténébreuse avant que le rythme s'emballe comme un cheval au galop, ouvrant alors des paysages figés par une froide nuit boréale. Elégance et âpreté écartèlent cette composition tumultueuse que tapissent des claviers englués dans la nuit.
Après une entrée en matière aussi magistrale, le reste du menu peine à soutenir la comparaison. Si, aux côtés d'un 'Defender' dont le socle implacable est percé par un solo éruptif, 'Breakwater' brille d'une furieuse majesté alors que 'Valkyrie' est secoué par un tempo quasi martial qui s'additionne à des lignes de guitares frissonnantes de tristesse, "Constellation Of The Black Light" n'évite pas toujours, à l'instar de ses devanciers, ces mélodies éprouvées ('The Saw'), ces morsures typiques du genre ('Forge With Fire'), même si tout cela demeure extrêmement bien fait.
Quant à 'Warfare', en arborant le visage le plus sombre et agressif de ses auteurs, il nous fait quelque peu regretter, par sa féroce vélocité, les accents doom qui s'accrochaient à "Winterborn" et que Wolfheart délaisse depuis lors au profit d'un death souvent plus direct, comme l'illustre ce quatrième album techniquement impeccable mais que seule sa grandiose amorce aux couleurs d'un black metal atmosphérique et ombrageux élève véritablement au-dessus de ses récents aînés.
Il n'en demeure pas moins que les Finlandais maîtrisent sans fausse note un style qui réclamerait cependant de leur part - et toujours - une audace à laquelle ils s'essaient encore trop timidement...