Si Witch Mountain n'avait pas attendu Uta Plotkin pour exister et enfanter en 2001 un "Come To The Mountain" matriciel, il n'en demeure pas moins que son recrutement en 2009 coïncida pour le groupe autant avec sa renaissance, après dix ans d'abstinence discographique qu'avec son envol vers une réussite plus grande encore, plus doom surtout et moins stoner.
Alors que les Américains avaient trouvé en ce petite bout de femme la pièce qui manquait à leur édifice, témoin l'orgasmique triplette "South Of Salem" / "Cauldron Of The Wild" / "Mobile Of Angels", gravée entre 2011 et 2014, le départ de la chanteuse, survenu peu après le quatrième album, n'augurait rien de bon pour la suite de leur carrière. Nous étions nombreux à nous demander comment le groupe de Portland parviendrait à survivre à cette amputation d'autant plus que le talent vocal de la belle se doublait d'un charisme certain. Conscients qu'ils ne devaient pas pour autant renoncer au chant féminin et renouer avec le registre masculin de leurs débuts, Nathan Carson (batterie) et Rob Wrong (guitare) n'ont cependant pas mis longtemps pour lui trouver une remplaçante, en la personne de Kayla Dixon alors âgée de dix-neuf ans.
Si, en septembre 2016, le single 'Burn Your Down' a rassuré quant à la bonne santé du groupe et son choix de jeter son dévolu sur une quasi inconnue, le successeur de "Mobile Of Angels" aura toutefois connu une longue élaboration. Bien que son titre éponyme suggère pour ses géniteurs un nouveau départ, cette cinquième bûche dévoile un Witch Mountain tel qu'en lui-même, plombé et majestueux, la peau velue et rocailleuse. En revanche, il est certain que ce dernier compte sur cet opus pour effacer à nouveau plusieurs années de disette et reconquérir son trône, aidé en cela par une recrue de choix dont le spectre vocal impressionne, faisant le grand écart entre la tessiture sentencieuse typique du genre ('Mechanical World') et de brusques éruptions death metal ('Midnight').
Qu'elle ait reçu une formation classique et jazz s'entend tout du long du curieux 'Hellfire', respiration qui permet de souffler avant le plongeon dans les quatorze minutes abyssales du terminal 'Nighthawk', lequel illustre que les Américains n'ont rien perdu de leur habileté à forer les profondeurs de la terre en distillant une ambiance engourdie et désertique tout ensemble. Les atours les plus testiculeux de Kayla leur ouvrent qui plus est les portes de l'enfer lors d'un périple épique à travers un relief vaste et escarpé, oscillant entre montagnes boisées et gouffres vertigineux.
Du coup, les perspectives qui s'offrent à eux paraissent immenses et laissent espérer une prochaine offrande plus aventureuse, nourrie de ce combustible vocal aussi velouté que brutal. Si, à son écoute, on sent un groupe un peu timide car hésitant entre continuité et évolution, "Witch Mountain" n'a pas à rougir de la comparaison avec ses glorieux aînés, véritable enclume en honneur d'un doom terreux et minéral sous la surface duquel couve une force sismique.