Graveyard, qu'il ne faut bien entendu surtout pas confondre, entre beaucoup d'autres, avec son homologue espagnol au registre nettement plus cadavérique, est de retour avec une cinquième rondelle baptisée "Peace". Il est difficile de ne pas lire à travers ce titre la volonté du groupe de tourner la page de trois années chaotiques qui l'ont vu déclaré sa mise en sommeil en septembre 2016. Epuisés, les Suédois avaient grand besoin de repos afin de se régénérer, de recharger leurs batteries après moult concerts et un décevant "Innocence And Decadence" (2015) qui confirmait que ses auteurs étaient vidés, leur formidable sève rock'n'roll asséchée, pressée comme un citron.
S'ils ont très vite annoncé leur retour, il aura fallu patienter près d'un an pour que ce nouvel album commence à être évoqué. Fallait-il pour autant se réjouir de ce retour prématuré ? "Peace" en apporte la réponse, brillante et énergisante. A son écoute, on mesure combien Graveyard a eu cent fois raison de freiner cette course en avant qui sinon aurait abouti à son explosion définitive. Plus en forme que jamais, le combo renoue avec la réussite de "Hisingen Blues' (2011) et surtout "Lights Out" (2012) pour un résultat plein d'une fraîcheur revigorante et débordant de ce feeling humide par tous les pores.
Chef de file de cette vague rétro suédoise aux allures d'A.O.C., Graveyard se distingue pourtant de la plupart de ses collègues amateurs de sonorités vintage par ses racines bluesy ('Del Manic') qui font plus qu'affleurer à la surface de compositions ciselées à la manière d'une orfèvrerie ancienne et cette façon très particulière qu'il a d'errer entre lumière et noirceur, entre un pur rock boogie ('The Fox') et un stoner rugueux ('Walk On'). Si à l'arrivée, on obtient un opus conforme à ce qu'on attend de ses géniteurs, témoins les vitaminés 'Cold Love' et 'Bird Of Paradise', "Peace" s'aventure sur un terrain parfois plus mid tempo comme l'illustrent le pesant 'Please Don't' aux traits épais et le terminal 'Low (I Wouldn't Mind)' qui n'hésite cependant pas à trotter lors d'une juteuse fin de parcours.
Si le départ du batteur Axel Sjöberg est regrettable, le groupe s'appuie toujours sur le chant de Joakim Nillson, tour à tour puissant et chaleureux, qui trouve dans le velouté 'See The Day' matière à affoler les minettes. Simples et immédiates, ces chansons n'en offrent pas moins aux musiciens l'espace pour s'exprimer avec une vigueur orgasmique, à l'image de 'A Sign Of Peace' aux parties de guitares aussi savoureuses que remuantes.
Retour aux sources doublé d'un retour en forme, "Peace" dévoile un Graveyard apaisé et revigoré.