Le label Frontiers n’a pas son pareil pour organiser
des mariages de talents, à tel point qu’il pourrait déboulonner de son
piédestal n’importe quel site de rencontre ayant pignon sur rue s’il lui venait
à l’idée de diversifier ses activités. A constater les retrouvailles, un quart
de siècle après leur première association, de Johnny Gioeli et de Deen
Castronovo, le label Italien pourrait tout aussi bien, s’il lui en prenait le
loisir, mettre au tapis copains d’avant le fameux site surfant
sur la nostalgie des bancs d’école et des camarades qui les peuplaient.
1992, Hardline, groupe de hard mélodique américain
sort son premier opus et le succès est au rendez-vous. L’inspiration des deux
protagonistes y est pour beaucoup. 2018, les retrouvailles sont organisées par
la marieuse transalpine et le binôme jette en pâture aux adeptes du Dieu Mélo sa première production "Set The World On Fire".
Question pedigree on est en terrain connu et apprécié.
Gioeli a poussé la chansonnette chez Axel Rudi Pell et Castronovo fût
partenaire de fûts et de micro chez Journey et Bad English. Il officie
aujourd'hui au sein de Revolution Saints et de The Dead Daisies. Mais, au-delà
de Frontiers, c'est bien à un homme que nous devons l'osmose de ce partenariat,
et lui aussi figure sur vos tablettes.
Le Monsieur se nomme Alessandro Del Vecchio et ses
incursions dans le petit monde du hard rock mélodique sont si nombreuses qu'il
serait fastidieux de les lister ici. Ce claviériste compositeur et producteur
insuffle dans l’œuvre tous ses talents en teintant radicalement l'album de ses
couleurs personnelles.
Gioeli et Castronovo assurent les accroches vocales et
propulsent les mélodies sur des territoires que n'aurait pas reniés Journey et
qu'on retrouve avec évidence dans les compositions de Revolution Saints. Autant
dire que l'écoute de l'opus est aisée tout autant qu’agréable et la musicalité
des propos particulièrement tenace à l’esprit.
Toutefois, il est honnête de convenir que peu de titres
s'évadent de la prison de mid tempi/ballades dans laquelle le groupe a souhaité
les enfermer. Mis à part le morceau éponyme, 'Fall Like An Angel' et 'Run For Your
Life', l'album peut s'écouter lors du déjeuner du dimanche chez votre belle-mère
sans que le vénéré rôti, même servi saignant, n'implose à la face des convives,
expulsant ses sucs d'hémoglobine tel un Gene Simmons facétieux. Ici Mesdames et
Messieurs, le plus souvent, on ne bastonne pas les pavillons auriculaires, on
électrise et martèle mesurément les conduits auditifs.
Ainsi, ce "Set The World On Fire", s'il est à mettre sans
ambages entre les mains de tous les fidèles nostalgiques de Journey, pourrait,
malgré ses qualités indéniables, déclencher chez les musicalement plus musclés
une dépigmentation de l'épiderme, fichant en l'air sans coup férir leurs patients
travaux de bronzette estivale. Professionnel et cliniquement ajusté, mais
manquant quelque peu d'envie de rentrer dedans, ce premier essai de la paire
Gioeli/Castronovo va clairement diviser les foules. Mais diviser n’est-il pas
régner ?