Après un décevant "Absorption Lines" publié en 2017, Jet Black Sea, toujours mené par Adrian Jones, leader de Nine Stones Close, nous revient avec un troisième album, constitué d'un morceau epic de 35 minutes, enchâssé entre deux courtes plages.
En guise de hors-d'œuvre, 'Escape Velocity' ouvre le bal en mode atmosphérique teinté d'electro où la guitare pleine de réverb' vient poser ses notes avec délicatesse, avant un léger durcissement du propos concrétisé par une guitare tranchante et une voix aigüe puissante. Plutôt bien charpentée, cette première pièce apparaît toutefois quelque peu décalée par rapport à la suite.
Car cette suite est constituée par une plage de 35 minutes, 'The Overview Effect', qui démarre par une longue introduction planante et envoûtante. La basse se met ensuite en route, c'est elle qui servira de véritable clé de voûte à l'ensemble du titre. Une basse qui joue dans les profondeurs et qui rappelle un certain Roger Waters. Nulle coïncidence ici, puisque dès la onzième minute, un passage de claviers très Berlin School sert de support à une guitare gilmourienne en diable, délivrant ses saillies sur un rythme très lent et 'The Overview Effect' nous emmène sur les traces du Floyd psychédélique et avant-gardiste, celui de "A Saucerful of Secrets" et autres "Meddle".
L'ambiance est captivante, tenue par une rythmique syncopée et moult bruitages en tous genres, parsemée de dissonances sur quelques passages plus expérimentaux, et l'on retrouve tous les codes développés il y a plus de 45 ans par le groupe mythique avec une pointe de modernité apportée par des samples de cordes ou des sonorités electro. Et pour varier tout cela, rien de tel qu'un peu de guitare acoustique façon … "Animals" pour prendre une respiration et replonger de plus belle dans cette ambiance magique où le couple basse/guitare s'en donne à cœur joie. Les thèmes s'enchaînent et le temps file sans que l'auditeur ne s'en rende compte, car loin de plagier le quatuor londonien, notre duo décline une personnalité propre, retenant l'intérêt de l'auditeur au fil des minutes. Tout juste pourra-t-on mettre un petit bémol au niveau des voix, dont les limites sont vite atteintes dans les aigus, même si leur tonalité colle finalement assez bien à l'ambiance psychédélique.
'Home' vient enfin terminer en douceur et de fort belle manière cette trop courte galette, sous la forme d'une ballade mélodique aux contours acoustiques, digne de figurer sur un album de Riversea, offrant en guise d'apothéose un poignant solo de guitare.
Remettre au goût du jour une musique datée de plus de 40 ans n'est pas chose facile. Jet Black Sea y parvient avec panache, modernisant le propos de manière formidable et nous délivrant, à la manière de Galahad avec son récent album "Seas of Change", une galette aussi inattendue que passionnante.