Après l'album sorti en duo avec David Jackson (ex-Van der Graaf Generator) en début d'année, c'est à une autre collaboration de David Cross que nous convie fin 2018 Cherry Red Records en exhumant un enregistrement vieux de douze ans d'âge jamais paru à ce jour. L'ex-violoniste de King Crimson ("Larks' Tongues in Aspic", "Starless and Bible Black", "Red") s'est associé au batteur et percussionniste Andrew Booker (Tim Bowness, No-Man, Sanguine Hum) le temps d'un album d'improvisations. Les deux hommes se sont rencontrés en 2006 à l'occasion d'une tournée à laquelle participaient le David Cross Band et le Harmony and Diversity de Pete Banks dans lequel Andrew Booker officiait en tant que batteur.
Comme tous les albums basés sur des improvisations, il est nécessaire d'être sensible à la technique et à la virtuosité des musiciens pour apprécier la musique de "Ends Meeting". L'absence de thèmes auxquels se raccrocher, des airs plus chargés d'ambiances que de mélodies à proprement parler constituent une expérience à laquelle l'auditeur doit être préparé et consentant, au risque d'être complètement désorienté.
Ce préalable étant admis, l'album ne pourra que faire les délices de l'amateur averti : la virtuosité du violon de David Cross, peu avare d'envolées fulgurantes, se marie à merveille à la finesse et la complexité du jeu d'Andrew Booker, une basse sombre tenant régulièrement le rôle du bourdon et quelques synthés jouant les arbitres. Des senteurs moyen-orientales aux danses slaves, en passant par les sonorités indiennes de 'Spared Bhangra', la première moitié de l'album baigne dans une atmosphère assez world music. L'ambiance change avec 'Worship The Gourds', le morceau le plus expérimental (et disgracieux) de "Ends Meeting", plutôt hermétique. Fort heureusement, le meilleur reste à venir avec le long titre éponyme nous renvoyant à l'époque de "Lark's Tongue in Aspic" où un autre percussionniste surdoué, Jamie Muir, donnait la réponse aux improvisations de David Cross.
"Ends Meeting" distille un plaisir qui naît plus de la perception du travail des deux musiciens que des mélodies qui restent au second plan. Pour peu qu'il ne soit pas réfractaire à ce genre d'exercice, l'auditeur pourra se fait piéger par les atmosphères que dégage l'album.