Même si Monolyth n'a pas l'âge des gros blocs de pierre ancestraux taillés par l'homme, l'histoire du groupe né à Beauvais ne date pas de ce nouvel album. En fait le groupe a 12 ans d'existence, ce qui est déjà beaucoup dans l'industrie musicale actuelle qui a tendance a multiplier les groupes Kleenex. Mais, en matière de metal, ce constat semble être atténué, les groupes étant pour la plupart plus soudés. Monolyth s'est ainsi forgé au fil des ans une belle réputation taillée à grand renfort de concerts donnant corps au premier album ("Catch The Sun") sorti en 2007 et à l'EP ("The Forwarder") réalisé en 2011.
Les morceaux de "A Bitter End / A Brave New World" (un hommage à Iron Maiden ?) ont été composés par le duo Amaury (chant) et Julien (guitare et chant) en 2016. Il aura fallu donc deux ans pour les enregistrer, masteriser l'album, dessiner une pochette digne d'un blockbuster de science-fiction et trouver un label. Et nul autre que Season Of Mist ne pouvait se porter volontaire pour distribuer ce mastodonte. Ce qui caractérise cet édifice est le mélange de thrash, death metal, hardocre, heavy et neo metal. Si cet agglomérat musical pourrait faire craindre une difficulté d'écoute, les doutes sont vite balayés dès les premières secondes.
Aucune longue introduction ne viendra accueillir l'auditeur qui rentre dans le vif du sujet en se prenant d'emblée le mur du son dans les esgourdes. Histoire de les décrasser au Karcher, Monolyth ne fait pas dans la demi-mesure et entame son nouvel album par 'The Ego Disaster' avec son hurlement primal, sa batterie qui défonce tout sur son passage, ses riffs agressifs, son refrain entêtant, le tout étant proche du death mélodique. Il faut dire que "A Bitter End / A Brave New World" est bâti sur des hymnes ultra efficaces. Le groupe y apporte une saveur supplémentaire en s'amusant à brouiller les pistes des styles abordés dès 'This Pale Imitation Of Guilt' mené tambour battant, tutoyant le speed hardcore avec la frappe à mille à l'heure, impressionnante, de Batt.
Monolyth fait aussi preuve d'une belle intelligence dans l'agencement des titres avec des portes d'entrée disséminées dans presque chaque morceau, permettant non seulement au néophyte d'avoir l'impression d'une certaine accessibilité mais au plus fan du genre d'y trouver aussi de l'intérêt avec quelques éléments plus complexes et redoutablement rudes ('A Brave New World'). Le refrain fédérateur de 'Insipid & Shallow' illustre cette ingéniosité tout comme le placement en milieu d'album de 'A Bitter End', titre mid tempo assez dense et sombre qui semble clore ici la première partie d'un concept album. Tout porte à croire qu'il en s'agit d'un, d'une part en raison de la pochette, d'autre part avec le chant souvent doublé, hurlé puis clair, multipliant les techniques qui donne l'impression de personnages qui se répondent. De là à y voir ici un concept écologique où l'homme avec son ego finira par causer sa perte.... il n'y a qu'un pas et il appartiendra à l'auditeur d'en faire sa propre interprétation.
La production sèche et brute participe à cette appréciation. La rythmique est bien mise en valeur avec une batterie tatychardique et des riffs bien acérés mais noyant quelque peu la basse. Quelques courts soli viennent d'ailleurs s'y greffer (notamment dans le plus heavy 'Devoid Of Compromise'), auxquels s'ajoutent des nappes de claviers qui insufflent à la musique une touche symphonique, épique et dramatique. Mais c'est surtout la manière de chanter qui impressionne avec ces alternances de grunt et de voix plus claire et rauque d'Amaury, aidé par le fait que les lignes vocales sont parfois doublées par Julien.
Au final "A Bitter End / A Brave New World" est une belle surprise autant pour sa maîtrise que pour son accessibilité et son exigence qui plairont au plus grand nombre. Monolyth signe ici le blockbuster musical de ce début d'automne, ce qui augure ainsi un bel avenir.