Au jeu des sept familles, dans la famille Dickinson (Bruce) je voudrais le fils cadet, Griffin. Bonne pioche ! Baigner dans la musique depuis son plus jeune âge, qui plus est dans une famille avec un patriarche aussi célèbre que le leader d'Iron Maiden, peut irrémédiablement conduire les enfants à un besoin d'émancipation afin de se faire un prénom et pas simplement être connu pour "être le fis de....".
En créant son groupe Shvpes, Griffin a donc choisi de se distinguer, comme Austin son frère en son temps, en baignant dans une musique qui n'a que peu à voir avec le groupe de son illustre père. En 2014, le groupe sort un album nommé "Pain. Joy. Ecstasy. Despair" plutôt bien accueilli par la critique anglaise dont le style épouse le metalcore qui mélange allègrement le metal, le hardcore, l'alternatif jusqu'au hip hop. Si ce premier méfait pouvait souffrir néanmoins d'un manque de personnalité marqué du sceau de l'influence de Rage Against The Machine, "Greater Than" est-il appelé à gommer cette impression ?
Le style évolue dans le sillage du précédent, mais la bande à Griffin a su estomper le tempérament soulevé dans le précédent album. Les compositions dépassent rarement les quatre minutes et visent l'efficacité. Le groupe enlève à sa musique toute velléité d'allonger les titres en allant droit au but en s'abstenant de balancer des solos de guitare démonstratifs. Cette recherche d'immédiateté est d'emblée offerte par 'Calloused Hands' avec son refrain diablement efficace qui vient après des couplets au flow urbain. Mais très vite, le naturel revient au galop et quelques relents de RATM se font encore sentir dans 'Someone Else' avec son phrasé à la Zack De La Rocha.
Si cette volonté de se détacher des influences est sous-jacente, elle se fait au détriment d'un manque cruel de cohérence. Le style semble être là pour plaire au plus grand nombre avec des titres qui mélangent allègrement couplets hardcore et refrains presque pop qui sonnent trop propres pour sonner vrais ('Undertones'). Le style tutoie l’easy listening et une facilité d'écriture un peu terne comme dans 'Afterlife' avec son passage choral baroque un peu cliché. Shvpes va même jusqu'à glisser insidieusement un titre purement hip hop, 'Two Wrongs', qui a certes le mérite de varier les plaisirs mais qui égare un peu plus l'auditeur dans les méandres d'un album qui perd son fil rouge et un peu plus de son âme. L'architecture même se calque sur les disques de rap avec des interludes courts comme 'I'm Stuck' qui à grands coups de « bitch » ou de « shit » accentue le côté bateau du genre.
"Greater Than" n'est pas forcément un disque raté, les morceaux sont aisément assimilables et suffisamment fédérateurs pour susciter un intérêt, mais l'absence de prise réelle de risque et cette impression de ratisser large lui donnent un arrière-goût légèrement amer que les fans hardcore auront du mal à pardonner ou accepter.