Sculpteur d'un doom préhistorique, Conan est une référence en matière de lourdeur sismique, mammouth écrasant tout sur son passage. Mais son expression du genre, d'une pesanteur absolue, se double d'un refus à toute concession mélodique. Aucune lumière ni joie ne viennent réchauffer un art primaire taillé dans les entrailles caverneuses de la terre.
Depuis le matriciel "Monnos" (2012), les enclumes se suivent et ont malheureusement tendance à se ressembler. Si la qualité est toujours au rendez-vous ("Blood Eagle"), elle n'empêche pas de se demander si les Anglais ne sont pas prisonniers d'une signature gravée dans la roche. En cela, le successeur de "Revengeance" se veut à la fois une bonne et une mauvaise surprise. Bonne car "Existential Void Guardian" témoigne chez ses géniteurs de timides velléités d'évolution. Toujours aussi monolithique, le style reste aisément identifiable, grâce à la voix de canard énervé de Jon Davis et cette façon unique de faire trembler les murs comme si la terre était en train de se réveiller.
Mais cette fois-ci les morceaux ont subi des coups de ciseaux et aucun d'entre eux ne franchit la barre des sept minutes alors que leurs aînés se lançaient dans des marathons pachydermiques. Taquin, le trio s'amuse même à cracher la sauce en quelques secondes le temps d'un 'Paincantation' supersonique. En outre, on surprend aussi Conan en pleine vitesse (tout est relatif cependant), n'hésitant pas enclencher la seconde pour accélérer (un peu) le tempo, témoin ce 'Eye To Eye To Eye' néanmoins bien gras. Quant à 'Volt Thrower', il est pour ses géniteurs une tentative, plutôt réussie du reste, de couler leur doom bourru dans un moule au format court, plus accessible sinon mélodique.
Ceci étant, l'écoute de ce quatrième opus laisse toutefois un sentiment mitigé tant celui-ci peine à creuser de profonds stigmates dans la mémoire, à l'image de 'Prosper On The Path', amorce aussi plombée qu'anecdotique. De plus, on préfère finalement quand le groupe se contente de faire ce qu'il sait faire de mieux, soit ce doom massif et immobile aux allures de puissante excavatrice. 'Amidst The Infinite', 'Vexxagon' sont ainsi du pur Conan comme on l'aime, âpre et rocailleux cependant que 'Eternal Silent Legend' étonne par sa force percussive que libère le jeu de Johnny King, ancien batteur d'Altar Of Plagues et la fugace beauté qui suinte d'un final tricoté au bord d'un gouffre sans fond. Enrobées d'un son cradingue, les quatre pistes live en bonus se révèlent par ailleurs très dispensables et ne servent à rien si ce n'est à grossir un menu râblé et tendu.
En résumé, "Existential Void Guardian" est une demi-déception car il dévoile un Conan qui tente de se renouveler quelque peu sans vraiment convaincre alors qu'il demeure sans rival lorsqu'il ouvre les vannes d'une lourdeur démentielle et jusqu'auboutiste.