S’ils restent peu connus dans l’hexagone, les Suisses de Slam & Howie And The Reserve Men sont cependant les auteurs de sept albums depuis 2007, dont un "Live All Over Europe" datant de 2014, dernier témoignage discographique en date de la formation helvète. Après la tournée gravée sur cet opus, les membres du groupe ont ressenti une grande lassitude et la séparation semblait proche. Afin d’éviter cela, chacun vaqua à ses occupations afin de retrouver motivation et inspiration. Et si Lt Slam est parti à la découverte des grands espaces, ce ne sont pas ceux du grand ouest américain que laisse imaginer la musique qu’il pratique avec ses compères, mais plutôt celle des grandes plaines de Mongolie. Quatre ans plus tard, tout le monde se retrouve pour relancer la machine suisse sur les highways de ce rock à la fois country, folk et celte qui la caractérise.
Et visiblement, la pause a aéré les esprits et aidé à recharger les batteries car l’inspiration et l’énergie sont au rendez-vous. Le single ‘Once We Get There’ lance les hostilités avec son riff accrocheur en cavalcade, son rock sudiste aux sonorités western et ses guitares tendues et prêtes pour un duel à mort. Derrière leur attitude nonchalante, les Suisses ne se prennent pas au sérieux mais ils ne sont pas là non plus pour amuser la galerie, variant les tempi et les ambiances avec talent. La base reste southern et on pense parfois aux légendes du genre, en particulier sur un ‘Anywhere The Wind Blow’ alliant la lourdeur dont sait parfois faire preuve Lynyrd Skynyrd, avec une accélération à la Molly Hatchet sur laquelle les guitares s’en donnent à cœur joie. De leur côté, ‘Witness Of Dawn’, ‘Far Out West’ ou ‘The Legacy’ penchent plus vers la country-folk, ce dernier se révélant finalement un hommage à Lemmy Kilmister en reprenant de nombreux titres de Motörhead au sein de ses paroles.
Cette faculté à surprendre fait partie des qualités de cet opus qui n’hésite pas à nous embarquer vers les rivages irlandais (‘Blind Men’) et à recycler le riff de ‘It’s A Long Way To The Top’ d’AC/DC (‘Pretender’) ou celui du ‘Brown Sugar’ des Rolling Stones (‘You Got Me Good’) avec un enthousiasme communicatif. Sur ‘Calling Home’, ce sont des éléments reggae qui se mélangent à la country en alternant des couplets syncopés et un refrain entraînant. A noter également ‘Pass Of The Die’ qui se révèle être une ballade sombre narrant avec intelligence la rencontre entre les nord-Amérindiens et les colons venus d’Europe. Tout cela est mené par la voix chaude de Lt Slam renforcée par des chœurs virils et fédérateurs, le tout soutenu par une jolie triplette de guitares.
Au final, ce "Firewater" se révèle un bien bel objet qu’il serait dommage de ne pas prendre au sérieux, en particulier pour les amateurs de rock sudiste. Varié et cohérent, nonchalant et efficace, mélodique et énergique, il offre une belle palette de paysages musicaux et prouve que la Suisse peut offrir des formations talentueuses cherchant leur inspiration ailleurs qu’en Australie.