A l'heure de commencer cette chronique du 4ème album de Karmamoi, votre serviteur s'est replongé dans les écrits précédemment produits par ses confrères et notamment ceux décrivant le deuxième album du groupe, "Odd Trip", catalogué à l'époque en metal atmosphérique, avec des titres basés majoritairement sur une structure couplet/refrain.
Quel contraste avec ce nouvel album ! Le virage pris en 2016 avec la publication de "Silence Between Sounds" se confirme ici et les Italiens nous abreuvent avec délectation d'un progressif mélancolique et symphonique de toute beauté.
Les ambiances proposées sur "The Day is Done" peuvent se répartir en deux pôles. Tout d'abord, les parties chantées assurées par la voix plutôt plate de Sara Rinaldi distillent une mélancolie toute scandinave, que l'on pourrait rapprocher par instants de Paatos. Les rythmiques sont très lentes, les instruments insufflent une atmosphère apaisée qui peut aller d'instants très dépouillés ('Mother's Dirge' ou encore 'Running Through the Land' et son passage voix/basse) à d'autres bien plus riches, mais toujours en retenue. La flûte s'invite ainsi régulièrement, soulignant de sa rondeur le côté apaisant de ces parties.
En revanche, dès que le champ est laissé libre pour les sections instrumentales, la machine s'emballe progressivement et nous gratifie de montées en puissance façon post-rock qui souvent éclatent en chorus puissants au sein desquels apparaissent alors soli de guitare, déferlement de la section rythmique ou parties de claviers 70's.
Tout au long de ces passages, l'auditeur attentif rapprochera ces instants de Talk Talk (l'intrumental 'Getaway') ou encore Marillion (toujours 'Getaway' qui rappellera 'The Space'), Steve Rothery semblant être une belle source d'inspiration au moment de sélectionner les sonorités de guitare électrique. A l'opposé du spectre, ambiance piano-bar cosy et passages jazzy ('The Day is Done') apportent également leur contribution à l'éclectisme musical proposé par le duo italien et ses invités.
Mais, au-delà de cette simple description formelle, le talent de Karmamoi réside dans son incroyable capacité à mélanger toutes ces ambiances au sein d'un même titre, avec une fois encore un sens éprouvé de la mélodie qui fait mouche et des arrangements multi-couches qui offrent plusieurs clés d'écoute à l'auditeur. Il faut également souligner l'énorme travail de Daniele Giovannoni derrière les fûts qui, tout en sachant rester discret, impulse les multiples changements rythmiques qui donnent toute leur saveur aux différents morceaux.
Une petite heure de musique pour de grands moments d'émotion : petit à petit, Karmamoi fait son nid avec son progressif à multiples facettes, servi par une qualité d'interprétation et de réalisation de premier plan. Ne passez pas à côté de cette belle galette, accessible au plus grand nombre tout en étant suffisamment charpentée pour plaire aux plus exigeants.