Les Tambours du Bronx résonnent. Nos musiciens nivernais sont repartis sur le sentier de la guerre trois ans après le prédécesseur 'Corros'. On se souvient de ce collectif martial qui avait accompagné les Garçons Bouchers sur leur live en 1989 à la fête de l'Huma. Le groupe a grandi, a traversé tous les continents et a enrichi sa musique au fil des rencontres. Ils se sont même encanaillés avec des pointures comme Sepultura et Metallica. Le nouvel album intitulé "W.O.M.P." (comme Weapon Of Mass Percussion que l'on peut traduire par Arme de Percussion Massive, une formule qui fera plaisir à Colin Powell) risque de faire date dans l'histoire des Monostress et des Monocorps.
A l'inverse du précédent album qui était écartelé entre deux directions avec une attirance pour l'electro, Les Tambours Du Bronx mettent à profit leurs expériences et rencontres pour nous livrer un album aux sonorités metal indus. Ainsi, le groupe a convié des invités prestigieux pour ne pas s'aventurer en un territoire pas tout à fait inconnu. A la batterie, Franky Costanza (Dagoba, Blazing War Machine) répond présent, lui qui avait travaillé sur une reprise de Prodigy avec le collectif. Le chant est partagé entre Stephane Buriez (Loudblast) qui opte pour l'anglais et Reuno Wangermez (Lofofora) pour le français. Le DJ masqué Arco Trauma est aux claviers. Deux anciens percussionnistes ont totalement évolué dans leur branche musicale, s'emparant de guitare électrique et de basse.
Le résultat de cette fusion est particulièrement éloquent. L'auditeur est plongé dans une fournaise de 20 pistes pour une durée de 56 minutes. Les percussions écrasantes et folles sont bien toujours là. Si celles-ci ont souvent le dessus avec leur rythmique diabolique, elles laissent toutefois un espace de jeu au metal industriel qui n'est pas traité comme un faire-valoir, loin de là mais comme un partenaire. Bien souvent, ce sont les percussions qui ouvrent le morceau, comme une façon de motiver les troupes et de lancer les compositions metal. L'entente est une réussite et les guitares tranchantes ne déparent pas des sons infernaux et tribaux, avec des riffs aussi puissants qu'efficaces ('Mirage Eternel', 'Le Festin'). Les guitares électriques prennent parfois des courbes pour délivrer des soli courts et toujours incisifs ('Never Dead'). Quant aux claviers, leur son de scie sauteuse ne laissera pas l'auditeur impassible ('Delirium Demain') et ajoutent une dimension schizophrène à un ensemble déjà suffisamment torturé ('Jour De Colère', 'New Day' qui devrait être joué dans toutes les discothèques de la Géhenne).
La répartition équilibrée du chant violent et vindicatif en anglais et en français transmet un constat négatif de notre monde mais que toute amélioration doit passer par un chaos, aucun changement ne pouvant se faire avec l'apathie des foules qui attendrait un nouveau messie. Toute allusion avec une période politique mouvementée ne pourrait être qu'une coïncidence (approximativement ''Les Coupables/Ils savent de quoi on est capable'' sur 'Jour De Colère'). Mention spéciale au chant clair et diablement séducteur des deux chanteurs dont les voix incarnent tous les soubresauts de cette colère tout en se faisant très claires pour transmettre des paroles plutôt bien écrites ('Noir').
Le groupe s'essaie à l'exercice du cross-over avec une corrosive version du ''Requiem Pour Un Con'' de Serge Gainsbourg où Reuno se surpasse dans un registre magnétique et la reprise des Prodigy, 'The Day Is My Ennemy' qui est peut-être à la genèse de cet album. Cette piste reçoit le renfort d'Apolline Magnet (une autre Nivernaise du groupe Plastic Age) qui réussit à offrir une face lascive sur les refrains et rageuse sur les couplets. On pourra toutefois émettre un petit bémol sur les pistes courtes comme 'Desert Night Road' ' Nos Blessures' ou 'Dunes Of Ashes' qui si elles résonnent comme des pièces instrumentales cinématographiques alourdissent un ensemble déjà bien chargé. Toutefois, on nous répondra que ces courts morceaux permettent de souffler, tout en ravivant les braises, avant un nouveau tour dans le grand huit industriel.
Les Tambours de Bronx, accompagné de leur pléiade d'invités, sont de retour avec un album qui réussit la fusion entre percussions et metal indus. ''W.O.M.P.'' n'a jamais été près de STOMP, c'est à dire de livrer une musique écrasante au textes noirs mais jamais plombante. A l'écoute de cette musique qui aurait réussi à apprivoiser le tonnerre, on ne peut qu'imaginer l'ampleur spectaculaire de ce "W.O.M.P" sur scène.