Embryonic Cells est un trio entre black, thrash et death, digne héritier des années quatre-vingt-dix (Immortal, Emperor), avec Pierre Le Pape de Wormfood et Melted Space aux claviers. La formation a sorti des démos et trois albums studio, "Horizon" est son quatrième bébé.
"Horizon" se situe entre obscurité et épanchements lyriques. Dès les premières secondes, une aurore pâle nappe l’espace alors que des harmonies troubles s’élèvent. Mais aucun chemin ne semble rectiligne, car même si l’opus emprunte parfois des sentiers balisés, il porte en lui la variété irisée d’une aurore boréale hivernale.
‘Crossing’ débute sereinement l'opus, tandis que les brumes s'effilochent et qu’une mélodie de six-cordes dépouillée transperce le paysage sonore en équilibre précaire. Cette stagnation aux abords d’un ogre tentaculaire est vite brisée, lorsque des vibrations cycliques à la lumière mortifère remplacent l’extase précédente.
Les influences sont nombreuses, mais elles sont finalement plus aériennes que black. Ainsi même si ‘Carved In My Skin’ pioche dans du Enslaved avec son riff virevoltant ou ses synthétiseurs glacés et mystérieux (passage dorénavant obligé du style), il superpose un orgue majestueux, plongeant la piste dans un recueillement solennel. Les voix criardes de ‘Don’t Deserve Your King’ percent ce silence recueilli alors que les guitares saturées entament une course folle à la manière d'Immortal. Cette variation black aux contours symphoniques dispense des plaisirs certes sucrés ou acides, mais toujours malsains. ‘Horizon’ est une piste presque hackettienne, tout du moins ténébreuse et intimiste dont la noirceur laisse une trace profonde dans les mémoires. Embryonic Cells est à la fois teigneux et black (évidemment), mais aussi bouleversant sur chaque instant paisible qu’il propose. Et ce n’est pas ‘To Horizon’ qui prouvera le contraire, car il est habité par la plénitude d’une rêverie d’automne, entouré néanmoins de cauchemars tapis dans l’ombre. Le combo est donc vraiment à son aise sur des passages symphoniques et lyriques à l’ambiance noire.
Entre lévitation et lourdeur, l‘opus navigue, hésite... Sa version du death à la limite du doom sur ‘Across The Mountains’, franchit la limite qui la sépare du progressif par ses nombreuses variations de climats. C'est une ascension émotionnelle qui conduit à un instant jouissif où la froideur des guitares baigne la piste d’une aura presque mystique. Les harmonies proposées sur ‘Never Let You Fall’ illuminent la piste d’un mince espoir, alors que la puissance du chant grunt la projette au-delà d’un horizon sombre et glauque. Enfin ‘No Boundaries’ brise ses propres limites en proposant une synthèse des éléments précédents : terreur sombre, violence brute et chœurs grandiloquents, desquels émergent un plaisir simple et pur. On sent que sur les passages violents et résolument black, le groupe hésite entre grâce et disgrâce, entre le sombre et le clair... si bien que le naturel semble revenir au galop et sans cesse la clarté mélodique reprend le dessus sur l'obscurité.
"Horizon" est une œuvre sombre et mélodique qui va néanmoins au-delà de simples horizons artificiels, étendant ses nombreux tentacules au-delà de la limite des genres pour construire un conte à la beauté sépulcrale. Aussi froide que brûlante, la galette parfois consensuelle et attendue, parfois grandiose et époustouflante, est un pavé glacial, évanescent et fugace.