Et Jimm enfourcha son fidèle destrier et partit au galop vers de nouvelles aventures. Après deux albums qui avaient affolé la sphère metal, le mystérieux multi-instrumentiste décide de reprendre du poil de la bête. Accompagné de Guillaume Zito qui succède à Fred Quota à la batterie, Jimm nous convie au sein de son monde intérieur dont il a confié les clés à Fred Duquesne (Mass Hysteria).
Cette invitation ne sera pas une partie de plaisir où l'on bavardera à tort et à travers en espérant que le temps s'écoule le plus rapidement possible. ''In(can)descence'' avait planté le décor, maintenant Jimm décide qu'il est temps de l'envoyer en l'air. Pendant 41 minutes, l'auditeur va être ballotté dans un camion lancé à vive allure sur une autoroute metal et hard rock. Les guitares fendent l'air et ne manquent jamais de décapiter quelques têtes tandis que la batterie a la justesse de ne se montrer ni démonstrative ni bruyante. Les riffs de guitare sur 'L'Ivresse Du Pouvoir' aiguisent des poignards qui clouent l'auditeur, pas fâché de se trouver dans une position confortable pour goûter les soli musclés. 'Big Brother' remet les pendules à l'heure après un début chaotique pour se livrer à quelques soli plutôt rafraîchissants. Même lorsque Jimm s'aventure dans d'autres styles, on retrouve toujours son style écrasant. Aux portes du blues, l'excellent 'Ton Blues Dans La Peau' s'engloutit dans des remous hard-rock. 'Je Ne Veux Jamais Vieillir' et son solo hardi de guitare explose dans un milieu plus tempéré, ce n'est pas parce que l'horizon est plus calme, que la tempête ne vous trouvera pas. On saluera également la reprise de 'La Chanson De Prévert' de Serge Gainsbourg qui réussit sa conversion dans le cadre metal, la chanson se montre moins prostrée dans le regret et offre une certaine jouissance à l'image de son solo libérateur.
Saluons encore une fois un artiste français qui décide de chanter dans sa langue maternelle et ne pas se livrer à un exercice de style en utilisant l'anglais (non pas que ceux qui le font soient condamnables). La grande force de cet album c'est cette voix claire qui hurle mais articule les paroles nous permettant de saisir le degré de colère, de violence et douleur de son interprète. Celui-ci règle ces comptes avec l'état policier ('Big Brother'), les extrémistes religieux (''Dieu n'existe pas'' dit-il dans 'Prisonnier De Dieu'), la femme ambivalente baudelairienne ('Ton Blues Dans La Peau') et tout le monde ('La Haine'). Les paroles bien qu'accusatrices semblent assez justifiées pour ne pas n'être qu'une charge gratuite envers tout le système. Mais malheureusement, si le concept-exutoire se tient, l'auditeur aura parfois l'impression que la dose prescrite a été dépassée et que le gâteau, succulent au début, risque d'être quelque peu indigeste au moment d'avaler les dernières miettes (la chanson-titre par exemple semble être trop calquée sur les précédentes avec ses cris qui semblent auto-caricaturaux ou encore 'Nos Elites' et son chant légèrement agaçant).
Jimm nous revient encore plus en colère ! Digne représentant d'une tradition hard-rock-metal à la française, l'homme en courroux nous dresse un panorama plutôt noir de nos contemporains. Ce protest-singer moderne n'a pas fait l'impasse sur la musique au détriment des textes, sa grande force est d'avoir pu mettre du son et des mots sur sa colère. En somme, avec "Distorsion Cérébrale", Jimm nous offre la bande-son de notre quotidien.