En cette année 2018, Yes fête ses cinquante ans. Mais quel Yes ? Pendant que la marque officielle continue de tourner avec une formation dont il ne reste qu'un seul membre de la période dorée, le trio ARW a accolé l'étiquette derrière ses initiales pour célébrer ce demi-siècle d'existence. Et comme rien n'est jamais simple dans l'histoire de ce groupe, voilà maintenant qu'arrive un tribute à sa gloire, piloté par Dave Kerzner, et faisant appel, parmi beaucoup d'autres, à trois des membres actuels du groupe (Billy Sherwood, Geoff Downes, Jon Davison) et quelques anciens (Tony Kaye, Tom Brislin), au risque de frôler l'auto-célébration.
A leurs côtés, nous retrouvons d'autres pointures de la planète prog, toutes réunies autour d'une sélection de titres qui fera débat… ou pas. Les morceaux proposés sont bien évidemment tous légitimes, mais d'aucuns argueront qu'il manque quelques pépites : où est passé 'Awaken' ? Aucun titre postérieur à "Big Generator" ? Du coup on célèbre plutôt les 20 ans du groupe ? Eternel constat face à ce genre de réalisation, aggravé par la longueur de la discographie du groupe.
Il n'empêche que l'on aurait tort de ne pas jeter une oreille attentive sur ces reprises plutôt fidèles aux versions originales, du moins dans leur structure. Les différences se situent principalement au niveau des claviers dont les textures s'éloignent régulièrement des sonorités originales, et bien évidemment du côté des voix puisqu'hormis Jon Davison pour son medley acoustique 'Close to the Edge' / 'And You and I' / 'Wonderous Stories', aucun des autres chanteurs ne se rapproche ni de près ni de loin de Jon Anderson. Et c'est peut-être là que le bât blesse pour les aficionados du groupe, tellement imprégnés de cette musique et habitués à cette voix à nulle autre pareille, et qui trouveront certaines interprétations bien fades. C'est ainsi que 'Soon', habituel générateur de frissons dans le dos quand la voix cristalline s'élève ne me déclenche aucune émotion dans cette version soupe au lait portée par Sonja Kristina (Curved Air).
Au-delà du plaisir de réécouter ces pépites, l'auditeur exigeant trouvera quelques instants qui sortent du lot, comme par exemple 'Machine Messiah', ce qui au vu de ce qui précède n'étonnera guère, puisqu'il s'agit d'un titre non porté par Jon Anderson, ou encore la très bonne trilogie issue des années 80, extraite de "90125" et "Big Generator". Il résulte de tout cela un album qui reste avant tout un bel hommage à un groupe unique en son genre. Sympathique, mais on lui préfèrera bien évidemment toutes les versions originales.