Il y a 21 ans, Gotthard sortait un live acoustique intitulé "D-Frosted", album au format original qui mettait en valeur le talent de ses interprètes et en particulier celui du chanteur Steve Lee. En trois albums studios, la formation suisse s’était imposée dans son pays et cet opus lui permettait de passer au stade supérieur en dehors de ses frontières. La suite on la connaît : une succession de succès discographiques, une réputation internationale et un chanteur acclamé par tous les amateurs du genre. Décédé en octobre 2010, Steve Lee semblait ne pas pouvoir être remplacé. Pourtant, Leo Leoni tentait le coup en embauchant l’Australien Nic Maeder pour poursuivre la carrière de la légende helvète du hard mélodique. Malgré les incontournables comparaisons rarement en faveur des nouveaux venus, le quintet a réussi à enchaîner trois albums studios et des tournées ayant toujours autant de succès. Pour fêter les 25 ans de carrière du groupe et essayer d’imposer un peu plus son nouveau chanteur, Gotthard offre donc un "Defrosted 2 (Live)" qui peut aussi bien se révéler être une consécration qu’un véritable piège.
Afin de limiter l’excès de comparaisons entre les deux chanteurs, Leoni et sa bande limitent à six le nombre de titres communs entre les deux live. Quant au reste de la tracklist très fournie (24 chansons réparties sur deux disques), la majorité des morceaux est tirée des trois derniers opus afin de mettre Nic Maeder dans les meilleures conditions. Celui-ci ne peut cependant échapper aux ‘Hush’, ‘Mountain Mama’, ‘One Life One Soul’ et autres ‘Sister Moon’, ‘Lift U Up’ et ‘Anytime Anywhere’. Ce n’est d’ailleurs pas par hasard que le public se montre le plus réactif à ces occasions qui voient l’Australien s’en tirer avec les honneurs. Relativement respectueuses des versions originales pour la plupart d’entre-elles, ces pièces de légende se voient cependant réarrangées pour certaines. ‘Lift U Up’ profite du beau travail des choristes pour rester imparable en format acoustique, alors qu’au contraire, ‘Anytime Anywhere’ s’éternise un peu trop et perd en efficacité.
Devant une telle abondance, il serait rédhibitoire de s’attarder sur chaque titre. Nous nous contenterons donc de citer quelques surprises avec un ‘Sweet Little Rock’n’Roller’ doté d’un extrait du ‘Rock And Roll Ain’t Noise Pollution’ d’AC/DC en introduction, d’un piano bastringue renforçant l’ambiance légère et énergique et de chœurs qui se font souvent bien présents tout au long de cet opus. Un quatuor à cordes vient quant à lui enrichir plusieurs titres dont l’émouvant ‘Remember It’s Me’. Au rayon des ballades gorgées de feeling, Gotthard s’est depuis longtemps imposé comme un spécialiste du genre. Mais bien que cet exercice soit souvent réussi, il faut tout de même admettre que l’excès de sucreries n’est pas bon pour la santé et l’enchaînement de plusieurs de ces pièces délicates finit par handicaper la seconde partie de l’album. Dommage car Nic Maeder se révèle encore très doué pour transmettre les émotions avec talent et justesse. Est-ce pour compenser cet assoupissement que les Suisses rebranchent les guitares sur la triplette composée de ‘Starlight’, ‘Sister Moon’ et ‘Right On’ ? Difficile à dire mais bien qu’efficace et accrocheuse, cette démarche n’a plus grand-chose de l’acoustique vendu pour cet opus.
L’ensemble se clôture sur un rappel composé de la reprise de ‘Smoke On The Water’ aux arrangements countrysant et mettant en avant des choristes qui n’en demandaient pas tant pour en faire des tonnes sur les couplets qui leur sont offerts. Au rayon des inédits, on retrouve en bonus une version acoustique du ‘Bye Bye Caroline’, hommage non dissimulé au ‘Caroline’ de Status Quo composé et interprété avec Francis Rossi en backstage du Rock Meets Classic Tour. Quant à ‘What I Wouldn’t Give’, il s’agit d’une nouvelle ballade classique mais toujours aussi réussie et dotée d’un refrain envoûtant.
Difficile de se montrer négatif devant un tel étalage de talent et de gros moyens visant à offrir un maximum de plaisir aux fans du groupe. L’objectif peut être considéré comme atteint mais aurait probablement gagné à être allégé de quelques titres pour gagner en efficacité. Il n’en reste pas moins que Gotthard confirme son statut de groupe culte et prouve ainsi qu’il a réussi à surmonter la perte de son charismatique chanteur, imposant au passage son remplaçant comme un frontman de premier ordre.