En signant chez Mascot en 2017, Eric Gales voulait donner un nouvel élan à sa carrière. Pari réussi et succès mérité, l’excellent "Middle Of The Road" s’est classé à la quatrième place du palmarès Billboard Blues. Et pourtant l’Américain était loin d’avoir tout dit car "The Bookends", son seizième album studio, est encore meilleur. En dix titres plus inspirés les uns que les autres, ce nouvel opus résout à lui seul l’oxymore du blues moderne.

Pourtant "The Bookends" n’est pas à proprement parler un album de blues. Il est bien trop éclectique pour être cantonné à ce seul style et c’est bien ce qui en fait sa modernité. En ce sens, Eric Gales est bel et bien l’héritier de Jimi Hendrix, sa principale influence depuis toujours. Et il ne manque pas de lui rendre hommage avec les deux instrumentaux rock psychédélique qui ouvrent et ferment l’album, ‘Intro’ et ‘Resolution’.

Si la musique de Gales repose sur des fondations blues, comme en témoignent le magnifique ‘Southpaw Serenade’ en duo avec Doyle Bramhall II et le blues rock 'Something’s Gotta Give' avec B-Slade, elle respire avant tout le plaisir de jouer et la volonté de se confronter à tous les styles dans lesquels son groove unique peut s’exprimer. Du heavy rock ‘Reaching For A Change’, rappelant que Eric Gales a fait partie du super groupe Pinnick Gales Pridgen, au reggae ‘Somebody Lied’, toute la science du musicien, son exceptionnel jeu de guitare, son jeu de basse syncopé, sa voix soul chaleureuse sont basés sur le rythme. Pour les titres les plus funky (‘Watcha Gon’Do’, ‘It Just Beez That Way’), le groove est une évidence. Pour d’autres par contre, c’est une gageure car même une ballade rock composée par Eric Gales se démarque par une ligne de basse swinguante (‘How Do I Get You’). Jamais vraiment là où on l’attend, Eric Gales sait aussi surprendre avec une reprise toute en puissance et en émotion du morceau des Beatles, ‘With A Little Help From My Friends’. En duo avec Beth Hart, ce classique parmi les classiques sonne comme l’union fantasmée de Jimi Hendrix et Janis Joplin et renvoie avec pudeur au passé d’Eric Gales qui n’aurait sans doute pas survécu à sa dépendance aux drogues sans le soutien de son entourage.