Si le conformisme est souvent de mise au sein de la chapelle stoner où tous les groupes se sentent obligés de recourir à des codes immuables, tel n'est pas le cas de Pendejo dont le manche est planté dans un sol hispanique (alors que ses membres sont hollandais !) tandis que son chanteur, le patibulaire El Pastuso manie la trompette avec la même aisance qu'un jargon qu'on devine assez ordurier. "Atacames", le deuxième effort des Bataves, avait fait souffler un vent de fraîcheur sur le stoner doom il y a quatre ans. Nous sommes donc tout heureux de les retrouver, très en forme qui plus est.
L'inspiration dressée fermement, ils accouchent avec "Sin Vergüenzä" d'un méfait dans la droite lignée de ses prédécesseurs mais en mieux. Si, de par ses singuliers attributs le groupe est aisément reconnaissable dès un 'Don Gernan' épais comme un bon cassoulet, sa formule paraît cette fois-ci encore plus maîtrisée. Solidement charpentées, les compos se révèlent plus redoutables encore, détentrices de cette espèce d'agressivité solaire qui n'appartient définitivement qu'à leurs géniteurs.
Alors que le socle rugueux et les lignes de chant gouailleuses l'enrobent d'une lourde couche de saleté voire de méchanceté, la trompette insuffle beauté et gravité ('El Timon Holandes') à un menu plus travaillé et nuancé. Témoins ce 'El Espejo' qui a quelque chose d'une ballade crépusculaire ou bien encore 'Facista', longue et pesante reptation. Ce faisant, cette troisième enclume évite de sombrer dans le redondant contrairement à "Atacames" au demeurant sympathique. Toutes ses saillies font mouche, souvent acérées, toujours caillouteuses.
Le cuir tanné, les Hollandais ont des allures de mariachis dont les instruments sont gonflés d'un magma croûteux qui s'échappe en une lave abondante traçant dans le sol des stigmates vicieux. Le charme opère, à la fois ténébreux et bourru, car derrière les curieux artifices qui font la personnalité du combo, il y a des mercenaires aguerris, issus aussi bien des rangs de Bitcho ou de ReVamp, qui coulent une écriture imparable dans le creuset d'un stoner massif et grumeleux.
Résultat, "Sin Vergüenzä" est l'album le plus convaincant de Pendejo qui mérite d'être découvert au plus vite.