Lors de la réalisation de "Sight of Day", Brian Josh avait souhaité un album un peu plus optimiste que son prédécesseur, le propos de "Dressed in Voice" étant particulièrement sombre. Depuis, la disparition de Liam Davison, ami de toujours et pilier du groupe durant 18 années a forcément assombri les pensées du maître à penser de Mostly Autumn et ce nouvel album est tout entier dédié à la mémoire de celui qui, bien que dans l'ombre de Brian, n'en fut pas moins un pion indispensable de toutes leurs productions.
Dire que "White Rainbow" est mélancolique est un doux euphémisme, tant les différentes compositions de cette très longue galette (78 minutes au compteur) évoquent le souvenir de l'ami disparu, tant dans le propos musical que dans les textes. Les différentes plages vont ainsi convier le défunt à une cérémonie de funérailles viking, et les quatre premières d'entre elles vont exsuder toute la tristesse de ceux qui restent.
Après une introduction à la fois solennelle et feutrée portée par les Uillean Pipes de Troy Donockley, un premier epic permet à Brian Josh de libérer une partie de sa rage par le biais de riffs appuyés avec, comme pour mieux se souvenir du disparu, le retour à un artifice qui guidait les trois premiers albums à savoir la reprise d'un thème du précédent, en l'occurrence de "Sight of Day". Quant au long solo de guitare final, délivré dans une ambiance pendrago-floydienne sur fond de chœurs majestueux, il ne laissera vraisemblablement personne de marbre.
La suite de l'album va voir Olivia Sparnenn prendre les rênes vocales à la suite de son homme, pour des titres plutôt classiques alternant les ballades calmes magnifiées par la voix de la belle ('Burn', 'Run for the Sun' ou encore l'émouvant 'Gone') et morceaux plus progressifs incluant des développements instrumentaux faisant monter la température : c'est tout d'abord 'Western Skies' dont la deuxième partie très dynamique est ponctuée de coups de timbales, puis le grandiose 'Up' et son refrain mémorable, ses soli lumineux, le tout porté par Henry Rogers dont la performance derrière les fûts éclipse enfin ce qui était jusqu'alors le talon d'Achille du groupe.
Mais tout ceci n'est finalement que hors-d'œuvre pour mieux préparer l'arrivée du plat de résistance constitué par les 19 minutes de 'White Rainbow'. Découpée en quatre parties, cette plage – la plus longue dans la discographie du groupe à ce jour – nous propose une entame très floydienne, période "Dark Side of the Moon", avec un chant assuré par Brian Josh. Un interlude d'une minute assuré par Ian Jennings seul au piano, permet d'enchaîner sur fond d'orage déchirant le ciel vers une deuxième partie aux contours inquiétants, emplie de lourds effluves des atmosphères chères au Seigneur des Anneaux. Les guitares deviennent plus agressives, le chant plus rauque, avant qu'Olivia Sparnenn ne prenne le relais, en même temps que la pulsation s'accélère et que la belle ne nous décline un refrain une nouvelle fois fabuleux, faisant étalage de toute sa tessiture et sa puissance. Le titre continue ensuite de monter en puissance en entamant une sarabande dantesque où se superposent guitare rythmique, claviers et solo de guitare, soutenus par une section rythmique efficace. Et par-dessus toute cette puissante symphonie vient de nouveau claquer ce refrain imparable. Quelle beauté !
Les trois dernières minutes voient enfin une nette inflexion, débutant en mode acoustico-folk et proposant (enfin) un trait d'optimisme, reflété par une tonalité plus joyeuse et qui se termine par un nouveau thème joué à la guitare qui vous collera inévitablement des frissons dans le dos. Sur un schéma similaire à l'album précédent, Mostly Autumn conclut enfin par 'Young', ultime dédicace apaisée à celui qui aura été si bien honoré tout du long de cette sublime galette.
Un mot enfin sur le deuxième CD présent sur la version limitée de l'album. Comme à son accoutumée, Mostly Autumn y propose des titres de bonne facture mais un tantinet moins aboutis que ceux de l'album principal. On notera toutefois la splendide version longue de 'Gone', probablement absente du premier CD par manque de place, mais également 'Eternally Yours', titre extrait de l'album solo de Liam Davison, "A Treasure of Well-Set Jewels", publié en 2011.
Les mots sont finalement de peu de cas pour résumer ce treizième album studio de Mostly Autumn, tant l'émotion qui a prévalu à sa réalisation se ressent à son écoute. Hommage brillant à un musicien discret, "White Rainbow" brille de mille feux. Nul doute que depuis tout là-haut son inspirateur le verra scintiller.