Avec leur premier album "Inflamed Rides", O.R.K. avait posé les jalons d’un art-rock progressif original et complexe particulièrement intéressant, suivi de très près par "Soul Of An Octopus" deux ans plus tard. Ayant enfin trouvé refuge chez le label idoine à leur musique, KScope, les Italo-Americano-Australiens sortent leur troisième album "Ramagehead".
Colin Edwin insiste sur le fait que O.R.K. est un groupe à part entière et que la distance entre les quatre membres, disséminés entre les Etats-Unis, l’Angleterre et l’Italie, n’a pas eu raison de leur envie de continuer à donner vie à leur musique si particulière. On ne peut que lui donner raison à entendre la cohésion qui se dégage dans ce troisième album qui possède toujours cette signature propre au groupe. Dans "Ramagehead", O.R.K. établit un équilibre entre tonalités électriques et acoustiques de sorte que si l’écriture d’O.R.K. a pu se nourrir précédemment de dissonance et d’expérimentation, la rendant parfois difficile d’accès, les compositions brillent ici d’une grande fluidité et de mélodies assimilables dès la première écoute.
Le basculement de "Soul Of An Octopus" à "Ramagehead" se fait dans la continuité avec deux mouvements qui donnent une dynamique art-rock alternative à la fois accessible et percutante à l’album avec l’enlevé et sombre ‘Kneel To Nothing’ suivi d’une approche très créative sur les arpèges crimsoniens et les harmoniques naturelles du grungy ‘Signals Erased’. A partir de là et jusqu’à la fin du disque, O.R.K. construit sur des bases toujours originales une musique plus axée sur l’intensité émotionnelle dont le vecteur privilégié est le chant. La démonstration la plus flagrante réside dans le ténébreux ‘Black Blooms’ magnifié par la présence d’un Serj Tankian envoûtant. Cette participation donne le ton de la dimension vocale de l’ensemble de l’album et Lorenzo Esposito Fornasari s’en inspire dans ses interventions de grandes hauteurs à la croisée de Chris Cornell et Jeff Buckley (‘Signals Erased’, ‘Beyond Sight’).
‘Beyond Sight’ introduit cette partie plus organique de "Ramagehead", celle qui affiche la facette la plus intimiste d’O.R.K. avec une alternance de moments qui jouissent d’une certaine forme de tempérance et même de délicatesse (‘Beyond Sight’, ‘Time Corroded’, les déchirants ‘Black Blooms’ et ‘Some Other Rainbow Part 1’) et de morceaux aux constructions plus élaborées (‘Down The Road’ qui célèbre les noces de The Pineapple Thief et de Steven Wilson, le dynamique ‘Strangled Words’ et le magistral ‘Some Other Rainbow Part 2’). C’est l’emploi régulier d’arpèges de guitare acoustique et des formats mid-tempi, auxquels s’ajoute toute une garniture d’arrangements (électroniques pour ‘Down The Road’, violons et violoncelle dans ‘Time Corroded’ et ‘Some Other Rainbow Part 2’), qui fournit le cadre de ces compositions.
Tout en restant le signataire unique de son empreinte musicale, O.R.K. ajoute une autre dimension à la musique qu’il a déjà proposée dans ses deux précédents albums, déjà différents sur plusieurs points. "Ramagehead" n’est pas un album facile d’accès car le quartet est toujours adepte des harmonies exigeantes mais il demeure néanmoins l’album d’O.R.K. le plus abordable et probablement le plus intense.