Sphaera (ou Sphéra) est un groupe nancéien issu en 2016 de la collision d’univers complémentaires : à droite des musiciens bercés au prog' de Dream Theater, à gauche un chanteur doux-dingue aux textures vocales variées (Anthony ‘Vled Tapas’ (Cadnium)). Les zététiciens adorateurs de la musique, les musiciens à l’esprit critique, les tronches de travers ou les théoriciens du complot connaissent l'homme féru de vulgarisation musicale. Ce vicaire d’ombre et son aréopage répandent un évangile sombre écrit sur un premier EP, “C8H11NO2” (dopamine), puis un second “Teratology”. Ce dernier attire par son mélange bouillonnant de technique, de vocaux grunt, de chant clair et de voix dignes de Tex Avery !
Avec ‘Freaktion’, la rondelle exhibe une galerie de monstres musicaux. Les différents segments y sont comme une symphonie contemporaine étrange : rythmes chaloupés, voix se développant sur des mesures directes ou impaires, centre de la piste habité par les talents d’acteur du chanteur. C’est aussi au centre de ce maelström fumant que surgit une intervention lumineuse de six-cordes solitaire.
Une facette plus classique s’exprime sur ‘The Fallen’, death progressif fouillé et intelligible. Les guitares y sont mélodiques, la batterie chaude, l’intervention solitaire digne de Patrick Mameli (Pestilence), Paul Masvidal (Cynic) ou Jeff Loomis. Dans la même lignée, ‘Proteus’ est direct dès son entame avec son blast énergique et son riff rapide. Toutefois c’est la mélodie qui est indispensable à sa structure et lui permet ainsi d’irradier une énergie folle.
“Teratology” est une belle galette où le combo fait le pari de conquérir son public en seulement trois temps... et ce pari est brillamment réussi ! Car entre death technique et metal progressif, la formation tisse une toile suffisamment intéressante pour susciter l’attention. Mais Sphaera joue aussi avec nos nerfs comme un fieffé coquin, car avec cet EP il met l’eau à la bouche, puis laisse en suspens ce plaisir et suscite une grande attente avant la jouissance finale. “Teratology” est une belle démonstration du potentiel de la formation, ainsi qu'un avant-goût de ses très attendues futures productions, dont on sent déjà les spasmes épais.