Depuis une bonne décennie, Kinetic Element, groupe américain mené par Mike Visaggio, nous entraîne aux racines du rock progressif, celui des 70's, tout en l'habillant d'une certaine modernité. Après deux albums pleins à craquer de musique, le chanteur/claviériste nous propose une troisième offrande plus ramassée, concentrée autour de deux plages épiques, dont la durée se trouve en phase avec le nouveau standard imposé par la renaissance du vinyle.
'Epistle' entame cette nouvelle galette sur des bases rythmées, avec d'entrée une basse qui se positionne comme un des éléments fondateurs du son du groupe, jouant souvent dans les aigus. Ce premier titre quelque peu musclé pourra rappeler Deep Purple, d'autant qu'une (courte) ligne mélodique semble tout droit pompée sur "Smoke on the Water". Dans les passages plus calmes, un délicieux assemblage de lignes mélodiques qui se superposent vient rafraîchir les oreilles, permettant surtout de passer outre un chant qui, loin d'être désagréable, se révèle très quelconque.
Et après cette mise en jambes efficace, les deux pavés que sont 'All Open Eyes' et 'The Face of Life' vont quant à eux distiller tout ce que l'amateur de rock Progressif (avec un grand P) est en droit d'attendre. Des influences yessiennes évidentes personnifiées entre autres par des harmonies vocales et le jeu de basse de Mark Tupko, quand le thème principal du premier nommé évoque quant à lui Genesis, agrémentées de fréquentes ruptures rythmiques, de nombreuses séquences purement instrumentales et un mélange de sonorités vintage et modernes du meilleur effet.
Et pour ceux qui s'étonneraient de tant de classicisme, Kinetic Element introduit également quelques sonorités dissonantes ainsi que des parties techniques où les instrumentistes rivalisent de dextérité. L'ensemble est séduisant, conciliant les différents courants du rock progressif des années 70's avec un rendu moderniste, tout en restant accessible.
Hélas, quelques longueurs viennent entacher ce bilan jusqu'alors flatteur. Tout d'abord, les deux plages épiques peinent à convaincre en totalité : final pompeux qui traîne en longueur pour 'All Open Eyes', démarrage poussif de 'The Face of Life'. De même, on regrettera une trop grande profusion de thèmes, qui ne permet pas de développer certains d'entre eux plus en profondeur, donnant parfois l'impression de sauter du coq à l'âne. A l'inverse, les deux derniers morceaux, très similaires, se révèlent anecdotiques. Et enfin, on regrettera une production très moyenne qui ne rend pas vraiment hommage aux compositions intelligemment troussées, pleines de variété tant dans les thèmes délivrés par des mélodies facilement accessibles que dans leur rendu.
Malgré ces quelques points négatifs, "The Face of Life" reste un album à découvrir et qui nécessitera quelques écoutes pour intégrer tous ses éléments qui, une fois assemblés, procureront de bons moments musicaux à l'auditeur attentif.