Lloyd, c'est l'histoire de 3 frères qui veulent faire de la musique rock élégante en s'affranchissant des frontières et des clichés. Après deux EP plutôt blues pour le premier et plus aérien pour le second, les Parisiens nous offrent enfin un véritable album qui fleure bon l'expérience scénique accumulée depuis pas mal d'années. Un album d'une étonnante maturité intitulé "Black Haze" qui contient sa part de noirceur mais aussi une douce lumière diaphane et hypnotique. Plongeons ensemble au cœur de cet univers envoûtant.
Difficile, au final, de résumer cet objet musical non identifié tant il est riche et subtil. Ce qui pourrait le mieux le décrire est cette débauche de sensibilité véhiculée à la fois par la voix d'Alexis, qui parvient à passer de l'emphase théâtrale à la confidence susurrée, mais aussi par une production soignée, un son plutôt pop et organique, ou encore les harmonies délicates qui mettent en scène un piano virevoltant et une basse précise et acérée. Les arrangements et orchestrations variés démontrent également une certaine ambition qui semble se retrouver sur scène. Autre point essentiel, c'est la variété des ambiances et des rythmiques sur lesquelles la fratrie surfe avec facilité et délectation.
Avec 'I. Dreams Overture', Lloyd prend une direction alternative assumée, d'une force mélodique et d'une sensibilité très communicatives et puissamment saisissantes. Une superbe entrée en matière qui pose la musicalité à un niveau très élevé au gré de couplets hypnotiques, des ponts en rupture délicate et des refrains puissants et entêtants. Le chant d'Alexis magnifiquement placé et d'une quasi virtuosité émotionnelle nous prend là où il faut. La délicatesse qu'on peut notamment croiser dans un blues africain éthéré s'exprime dans un 'IX. The Fall' psychédélique, là où 'X. Black Haze' développe des accents de rumba légère et étirée dans une sonorité également seventies en forme de mélange des genres très agréable et superbement maîtrisé. C'est plus sur une tonalité pop rock que se déguste le premier single 'VIII. Not A Dreamer' qui est plus direct, moins original mais dont le caractère entraînant fait son petit effet. 'III. Prince Of Clouds' s'inscrit dans la continuité du titre d'ouverture avec le même type de ressort subtilement sulfureux dont la fibre évoque un peu Reign Of Kindo et son piano mis en exergue, tout comme "II. Anger', dont l'intensité nous emmène et nous dépose. Le final 'XI. Delirium' nous met un dernier coup au cœur dans son intro avant d'évoquer non sans une certaine douleur David Bowie.
La musique de Lloyd, fortement influencée par les années soixante-dix avec son caractère un peu psychédélique et sa sonorité, est fortement originale. Elle soulève l'émotion sans complaisance et sans retenue avec une ouverture d'esprit salvatrice dans un monde parfois trop formaté.