Après des débuts hésitant entre le stoner (son premier album) et le doom ("Monument"), Grand Magus a durablement établi son identité tant sonore (du heavy metal granitique) que conceptuelle (la mythologie scandinave est son combustible). Reconnaissable entre mille, la voix incandescente de JB Christofferson, sorte de David Coverdale viking, signe cette personnalité chaleureuse qui se décline d'une offrande à l'autre, tous les deux ans en moyenne et que nous avons donc appris à bien connaître.
Au point de ne plus être surpris quand vient le moment de découvrir une nouvelle cuvée des Suédois, d'autant plus que ceux-ci ne déçoivent jamais vraiment ou alors si peu ("Triumph And Power"). Pourtant, entre une amorce aux accents cinématiques inappropriés ('Gold And Glory') et un menu qui paraît tout d'abord ronronner plus que rugir, "Wolf God" laisse craindre non le faux pas mais un disque à la recette éprouvée que forge un groupe qui n'a plus rien à prouver - ce qui, eu égard au savoir-faire reconnu du trio, pourrait d'ailleurs suffire à notre bonheur.
Ayant cherché à privilégier la spontanéité en gravant les compos de ce neuvième opus en une seule prise dans des conditions live, le groupe donne ainsi l'impression de ne pas avoir forcé son talent, à l'image du titre éponyme certes diablement efficace mais qui peine à décoller, embarrassé par des hurlements de loup un brin ridicules. Mais, outre le fait que l'organe de feu de JB reste toujours chargé en une semence galvanisante, les écoutes successives dévoilent en définitive une moelle très riche.
Entre des harmonies vocales majestueuses ('Dawn Of Fire', 'Untamed') et des soli nourris aux seins du grand hard rock ('A Hall Clad In Gold', 'He Sent Them All To Hell'), "Wolf God" est rempli jusqu'à la gueule de moments de bravoure grondant d'une puissance fédératrice. Fidèle à sa signature, Grand Magus trouve l'équilibre parfait entre rythmique pesante ('Brother Of The Storm') et tempo soutenu (le rapide 'Spear Thrower'), entre envolées nordiques et riffs issus des aciéries britanniques, sans oublier ces refrains qui s'accrochent à la mémoire comme une moule à un rocher et donnent envie de galoper dans la montagne, une corne remplie d'hydromel à la main.
Conduit par une basse gourmande et cloué au sol par la frappe lourde de Ludiwg Witt (lequel s'en donne à cœur joie sur tout l'album), 'Glory To The Brave' se veut à la fois le morceau le plus épique du lot et celui qui résume le mieux l'essence de "Wolf God", lente et exaltante épopée aux allures d'hymne viking taillé pour le live. En le chevauchant, on mesure alors combien les Suédois ont eu raison de chercher à capter plus que jamais la force instinctive de leur heavy metal.
De cette démarche découle une rondelle mélodique et acérée dont le caractère brut de décoffrage ne lui interdit pas une forme de beauté enivrante. Grand Magus a définitivement gagné sa place au Valhalla.