Les choses sont allées assez vite pour le groupe californien Badflower depuis sa création en 2013 par quatre musiciens de Los Angeles. Un premier EP en 2013 suivi par un autre de trois titres en 2016 aiguisent les intérêts des auditeurs et des professionnels jusqu’à la sortie du single ‘Ghost’ en 2018 diffusé massivement sur toutes les plateformes commerciales américaines. Le quatuor se lance dans la composition de son premier album "Ok, I’m Sick" pour une sortie en début d’année 2019.
"Ok, I’m Sick" est un disque de rock alternatif assez conventionnel dans sa forme et plaisant dans son contenu. Le disque est bien garni avec un démarrage sur les chapeaux de roue grâce au rentre-dedans ‘xANAx’ au groove et à la fraîcheur qui font penser à Stevie Salas suivi d’une collection de mid-tempi aux réelles qualités mélodiques basés sur un schéma identique, à savoir couplets calmes et refrains plus enlevés. Badflower y maintient un niveau global de qualité, même si quelques redondances y sont déplorées, entre le réjouissant ‘We’re In Love’ qui utilise certaines techniques entendues chez Pineapple Thief et le plus ordinaire ‘Daddy’.
Si cette modalité confortable a les faveurs des Américains, ils démontrent une aisance dans les compositions plus progressives, dans le sens qui montent en intensité, comme l’illustrent ‘Heroin’ et sa cassure dynamique ou ‘Cry’, sa pesanteur martiale et ses intéressants arrangements de cordes. Badflower reste un collectif de jeunes musiciens dont la fougue rock s’exprime toutefois et avec un certain talent dans le fuzz ‘Die’ et le funky ‘Girlfriend’. Si quelques sujets sont abordés avec plus de légèreté, il ressort de cet album une tonalité sombre et même tragique si l’on s’attache à suivre les textes écrits par le chanteur écorché Josh Katz. Sa conscience très poreuse des humeurs du monde le conduit au morbide et l’amène à évoquer des thèmes graves, du suicide (‘Ghost’) à la souffrance animale (‘Murder Games’) en passant par l’addiction (‘Heroin’) et l’inceste (‘Daddy’).
A le considérer pour ce qu’il est, c’est-à-dire sans prétention à bouleverser le genre, "Ok, I’m Sick" est une bonne surprise car c’est un album abouti et mélodique. De plus, on peut saluer la prise de risque car il y a toujours engagement à exprimer un point de vue même si celui-ci est parfois excessif et immature (les charges politiquement correctes anti-Trump de ‘Die’, l’hédonisme de ‘Girlfriend’). "Ok, I’m Sick" reste la transcription d’une sensibilité dont les fragilités sont touchantes de sincérité.