La musique est devenue, avec l'évolution de son industrie, presque un sacerdoce. Pour pouvoir émerger du flot et du lot du nombre impressionnant de sorties quasi quotidiennes, l'artiste doit faire preuve d'originalité et surtout de persévérance. Pour autant, être simplement original ne suffit pas et il convient de proposer un projet de qualité au surplus authentique d'un point de vue artistique. L'équilibre est donc, encore plus que par le passé, assez difficile à trouver pour susciter suffisamment l'intérêt. C'est ainsi que Bruno Karnel avait étonné notre rédaction avec son "Satellite 3" sorti l'année dernière, troisième épisode d'une ambition plus grande.
L'artiste nomade propose dans ce quatrième volet une musique toujours aussi métissée, épicée d'accords de guitare acoustique sud-américaine issue du folklore notamment péruvien. L'auditeur retrouve ainsi ces ambiances ensoleillées et proches de la nature. Pour rappel, l’œuvre de l'artiste-artisan s’inscrit dans le sillon de la défense écologique et essaye de faire prendre conscience à l'auditeur de l'importance de changer nos comportements pour non pas empêcher mais ralentir la modification climatique inéluctable.
Ce "Satellite" met également en musique un texte du poète humaniste Cesar Vallejo qui prouve le profond attachement de Bruno à l'esprit et la culture des Andes. Le texte parle de la solitude et de l'introspection qui un jour peuvent toucher un homme, thèmes forts également de l'écrivain Paolo Coelho. Cette chanson met en avant les percussions et une voix à laquelle l'effet d'écho donne une impression de vertige illustrant cette réflexion sur soi-même.
Le morceau 'Anguilas En Paris' se rappelle au bon souvenir de 'Adour' présent sur le précédent EP en étant le titre le plus progressif. Il en conserve à peu près l'architecture avec une boucle mélodique que viennent agrémenter quelques ruptures, un peu abruptes et donnant parfois le sentiment d'être en contretemps, ce qui lui confère un léger côté expérimental. Bruno Karnel s'affirme comme un interprète plus sûr de lui même, notamment dans 'Wétaye' avec un spectre vocal qui apparaît plus dense que précédemment.
"Satellite 4 : En Ti Solo" place l'homme face à lui-même, isolé face à une nature en mutation. Il se veut objecteur de conscience pourvu que le message soit compris et que l'auditeur se pose les bonnes questions pour une remise en cause humanitaire salvatrice. Continuant son travail artisanal, ouvert sur le monde et sincère, Bruno Karnel perpétue la musique nomade, expérimentale et artistique dans le sens le plus noble du terme.