Si le nom d'Ed Wynne ne dit peut-être pas grand-chose à nombre de nos lecteurs, nul doute que celui d'Ozric Tentacles parle forcément aux oreilles de quiconque s'intéresse de près ou de loin à l'aventure du rock progressif, tant le groupe phare du space prog a marqué de son empreinte la fin du XXè siècle et le début du XXIè, même si son activité s'est notablement réduite ces dernières années. Il n'empêche qu'il aura fallu plus de 35 ans avant que son mentor ne tente l'aventure en solitaire, avec la parution en cette année 2019 de "Shimmer into Nature".
Vu par son auteur comme un refuge vis-à-vis du monde extérieur, cet album peut se comparer à une contemplation de paysages que l'on soupçonne magnifiques (son élaboration s'est effectuée alors qu'Ed Wynne vivait de manière quelque peu isolée dans le Colorado à plus de 2000 m. d'altitude), mais également à une forme d'introspection apaisée illustrée entre autres par l'artwork très flower-power de l'album. S'agissant d'un album solo, Ed Wynne s'est occupé de tout ou presque tout au long de ces 42 minutes, à l'exception de quelques percussions et bruitages laissés à la discrétion de ses invités.
'Glass Staircase' inaugure cette galette de manière très dynamique, posant ses différentes boucles sur une basse à la fois hypnotique et mélodique, le tout ponctué par quelques interventions de guitare. Bien évidemment, la patte Ozric Tentacles se retrouve à chaque instant ou presque de l'album, que ce soit dans les moments répétitifs les plus énergiques ou encore dans ses aspects plus expérimentaux qui guident par exemple 'Wherble' et ses rythmiques frénétiques.
Toujours sur le plan rythmique, les syncopes reggaeisantes si caractéristiques du groupe font leur apparition dans 'Travel Dust', pour notre plus grand bonheur. Le ton peut s'avérer toutefois plus léger qu'à l'accoutumée, les sonorités utilisées dégageant de l'ensemble une atmosphère quasi pastorale, même si le space-rock et ses mélodies répétitives ne sont jamais très loin. Les interventions de guitare qui viennent épisodiquement se poser par-dessus toute cette électronique nous renvoient quant à elles vers les travaux de Manuel Göttsching et Ashra Tempel, même si le côté répétitif se retrouve moins accentué sur cet album.
Au final, Ed Wynne nous propose un album dans la lignée de la discographie de son groupe, tendant à confirmer la probable mise en sommeil de celui-ci au profit de productions en solitaire. Les fans du genre apprécieront à leur juste valeur les cinq compositions présentées, tandis que nous ne pourrons que conseiller aux autres d'y jeter une oreille curieuse.