"Sympathetic Resonance" nous avait tellement enthousiasmés que nous espérions une suite à cet excellent premier album de John Arch et Jim Matheos sans avoir la certitude que ce ne serait pas qu’un one-shot. Il aura fallu patienter huit années avant de pouvoir répondre à cette interrogation avec la satisfaction d’entendre le prolongement de leur aventure collective. Arch et Matheos, en véritable orfèvres du metal progressif, peaufinent chaque parcelle de leurs compositions pour un résultat qui mérite bien une attente prolongée. Au milieu de leurs agendas bien chargés de ces dernières années (OSI, Fates Warning, album solo "Halo Effect"), les deux complices ont aménagé deux ans de travaux pour aboutir à l'attendu "Winter Ethereal".
La grande fidélité qui caractérise les deux amis explique la présence de deux sections rythmiques de Fates Warning, l'actuelle et la précédente avec Zonder comme frappeur (ce qui n'est pas pour nous déplaire) et Joe DiBiase à la basse. A ce groupe impressionnant s'ajoutent de prestigieux invités dont Sean Malone à la basse ou Thomas Lang à la batterie. Il fallait au moins une formation cinq étoiles pour donner corps à une musique exigeante de grande qualité composée par Arch et Matheos. En cela, "Winter Ethereal" est la suite parfaite de "Sympathetic Resonance” et l'auditeur qui a adhéré au premier album retrouvera tous les éléments qui ont justifié son consentement. Arch et Matheos ont breveté leur metal progressif basé sur l’association constructive dans laquelle chacun apporte sa pleine personnalité artistique pour un résultat global qui dépasse la seule addition de spécificités. Toute la réussite de cette collaboration réside dans le fait que John Arch contrebalance la virtuosité de ses chants par une vraie recherche harmonique et que Matheos ne surcharge pas ses motifs d’une technicité excessive et qu’il atténue l’incandescence de ses riffs adamantins avec des passages plus apaisés (‘Kindred Spirit’, ‘Vermilion Moons’, ‘Solitary Man’).
La construction du disque reflète cette nécessité d’équilibre entre des morceaux étendus et progressifs, des formats plus denses et directs et une accalmie acoustique au mitan avec la ballade sombre et cristalline ‘Tethered’. La première demi-heure dévoile la face la plus dure du combo avec un ‘Vermilion Moons’ à la dramaturgie crescendo, le direct et très mélodique ‘Solitary Man’ et un heavy ‘Wanderlust’ aux réminiscences de Fates Warning. Le premier sommet de l’album est incarné par l’épique ‘Wrath Of The Universe’ qui démarre sur une combinaison riff-thème très créative et déverse une puissance qui prend à la gorge pour ne jamais la lâcher. Une fois le groovy et immédiat ‘Straight And Narrow’ avalé, on s’attaque à une seconde partie de disque évocatrice de nuances et d’ambiances. C’est le second point culminant du disque ‘Pitch Black Prism’, poignant comme la tragédie de Tchernobyl dont il s’inspire, qui inaugure la suite de "Winter Ethereal" suivi par un homérique et queensrychien ‘Never In Your Hands’ au duel de guitares en son cœur. Le long final ‘Kindred Spirit’ est l’aboutissement de la tournure émotionnelle du disque sous la forme d’une épopée progressive époustouflante.
Comme pour son aîné, "Winter Ethereal" demande de nombreuses écoutes pour en savourer tous les délices. Le degré de finition apporté à l’ensemble de l’album procure un confort d’écoute qui va grandissant, la fluidité des parties se révèle petit à petit et l’appréhension devant cette œuvre intimidante laisse place à une addiction irrésistible. L’amateur du genre qui a l’oreille de plus en plus accoutumée à l’inflation de créativité émanant d’une offre pléthorique en metal progressif pourra pointer le caractère classique de ce disque. Mais de l’apport majuscule des différents musiciens, notamment les démonstrations à la batterie, à la production limpide en passant par la haute qualité des compositions et les acrobaties vocales, il est difficile de trouver le moindre défaut à "Winter Ethereal".