Fleshgod Apocalypse fait partie des défricheurs qui envoient valdinguer les habitudes... pour les réorganiser en un nouveau genre : le death classico-symphonique. Trois années après “King” qui avait charmé Music Waves et imposé une forte personnalité, les Italiens sont de retour avec “Veleno” (poison ou haine).
Les musiciens poussent ce style dans ses retranchements, faisant fi de toute barrière. Même si Cristiano Trionfera et Tommaso Riccardi ne sont plus de la partie, le groupe est plus que jamais soudé avec cette œuvre intense qui mêle riffs death et arpèges dignes de Mozart, chant âpre et envolées lyriques. Fleshgod Apocalypse est une apocalypse gothique, brutale dont le visage noirâtre est maquillé de teintes classiques. La forme est ultra léchée, le fond tout autant, car l’album propose un concept aux multiples ramifications.
Dès les premiers instants, les compositions sont ambitieuses et la mélodie omniprésente. Ainsi lorsque 'Carnivorous Lamb' pose de douces harmonies sur ses architectures techniques, c'est l'ombre de Scar Symmetry qui plane. C'est aussi la puissance vocale qui imprègne ce titre : la voix claire masculine mariée à une voix claire féminine sensuelle et au grunt masculin puissant font mouche immédiatement. Quant à 'Fury', il convoque l’esprit de Insomnium, Mors Principium Est, Septicflesh ou Omnium Gatherum. Les voix s'y superposent lorsque quelques notes de piano s’échappent. ‘Embrace The Oblivion’ est digne de Arch Enemy avec un solo ébouriffant.
L’album est un chef-d’œuvre d'équilibre entre grâce et abomination : même si certaines pistes débutent en douceur, c’est pour mieux écraser (‘Sugar’), puis effrayer avec des atmosphères dignes de Dimmu Borgir. L'album est imprégné d'une grande variété : mélodies sombres dignes du requiem de Mozart (‘The Praying Mantis' Strategy’, ‘The Day We’ll Be Gone’), ambiance gothique héritière de Paradise Lost (‘Monalisa’) ou vibrations sans concession propres à Spawn Of Possession ou Hour Of Penance (‘Worship And Forget’, ‘Pissing On The Score’).
Voilà un album intense et émouvant, à mi-chemin entre le classique (du death) et le classique (la musique classique). Le lyrisme et le death ont autant d’importance, laissant alors peut-être de côté l’urgence originelle... “Veleno” est une perle rare à l'intensité maîtrisée, la meilleure production de la formation, à la fois évidente, complexe, intense, et se moquant des conventions.