Après son départ de Katatonia en 2009, le guitariste Fredrik Norrman eut envie d’une musique plus accessible. L’idée fit son chemin petit à petit et il travailla sur ce projet en même temps qu’il redonnait vie en parallèle à October Tide. Il passa des nuits entières à composer et le premier album du bien nommé Thenighttimeproject parut en 2016, avec Tobias Netzell de In Mouring Flame au chant et Nicklas Hjertton de Mandylon à la batterie. Ces derniers quittèrent le groupe en 2017 par manque de temps et furent remplacés au pied levé par deux membres de Letters From The Colony, le chanteur Alexander Backlund et le batteur Jonas Sköld, tandis que le frère de Fredrik, le bassiste Mattias Norrman, rejoignit également le projet pour l’élaboration du deuxième album, "Pale Season".
Sur le papier, Thenighttimeproject a tous les atouts pour séduire les amateurs de mélancolie suédoise. Et à l’écoute de "Pale Season", force est de constater que la musique du groupe contient tous les ingrédients du rock progressif sombre et émotionnel dont l’école scandinave a le secret. A mi-chemin entre les atmosphères éthérées de Katatonia (‘Rotting Eden’) et le rock progressif nostalgique d’Opeth post-"Watershed" (‘Hound’), l’album alterne les influences ataviques, entre doom mélodique (‘Anti Meridian’) et rock gothique (‘Final Light’), sans jamais franchir la frontière du metal, à l’exception d’un chant growl timide à la fin du titre ‘Rotting Eden’.
Le parti-pris de se cantonner à un rock progressif sombre et parfois glacial n’est évidemment pas un défaut en soi et donne lieu à de purs moments de grâce. C’est notamment le cas du magnifique ‘Binary’ dont la très belle mélodie n’est pas sans rappeler le regretté Porcupine Tree, et du très beau ‘Signals In The Sky’, sublimé par la voix de Heike Langhans, chanteuse de Draconian.
En revanche, faire naître des émotions sur la durée nécessite plus que du savoir-faire en matière de composition. Or la musique automnale de Thenighttimeproject manque beaucoup trop d’aspérités pour réellement convaincre et s’avère souvent redondante (‘Final Light’, ‘Embers’, ‘Pale Season’), si bien que l’attention de l’auditeur tend à faiblir au fil de l’album qu’une production un peu terne participe à rendre si ce n’est ennuyeux, du moins monotone, voire soporifique.
Par son manque d’accroches, "Pale Season" est donc un album d’une beauté assez froide qui ne parvient jamais vraiment à provoquer chez l’auditeur l’empathie pourtant indispensable pour ressentir la mélancolie qu’il est censé exprimer. Dommage car Thenighttimeproject a un potentiel musical évident, même si nous pouvons douter qu’il ait un jour la puissance évocatrice de Katatonia.