Nous avions terminé notre chronique de "Leahtan" sur une note d’espoir et une attente. Depuis cette sortie en 2016, Leahtan a édité un troisième EP et cerise sur le gâteau un premier disque LP en octobre dernier. L'écoute de "State Of Mind" est l'occasion de faire le point sur la carrière du groupe.
Le détail qui saute aux oreilles dès les premières minutes d’écoute concerne la production nourrie aux hormones de croissance qui génère un puissant mur de son. Le détail et la nuance ne sont pas les points les plus mis en valeur dans le cahier des charges des Français, et ainsi ce rendu sonore trouve logiquement sa place dans l’orientation musicale du groupe. Le revers de la médaille est qu’une fatigue peut s’installer lors d’une écoute entière de l’album. D’autant plus que Leahtan est chiche en temps plus calmes alors que ceux-ci, souvent réduits aux introductions et aux interludes (‘Etat D’urgence’, ‘Synapse’, ‘Ashes And Stars’), apportent une respiration qui met en perspective l’énergie dont les Toulousains sont porteurs. Une énergie décuplée par un choix lucide de sujets en phase avec la période pré-insurrectionnelle et de grande instabilité politique qui est la nôtre. Les textes forts et revendicatifs de ‘Ennemis’ ou ‘Combat’ sont autant de manifestes pour une conscientisation des foules qui nourrit la dynamique de "State Of Mind". Si la langue majoritaire est l’anglais, la décision d’écrire en français sur quelques titres s’avère judicieuse et donne une force supplémentaire à l’engagement des titres.
Côté musique, Leahtan n’a pas révolutionné sa composition. On est au contact d’un metal moderne aux accents metalcore et neo dont la principale directive est l’expression de la puissance. Les formats courts (‘Combat’, ‘Etat D’urgence’, ‘Awakening’) sont l’occasion d’un déversement épais de matière visqueuse dans lesquels une certaine linéarité n’est pas problématique. Les compositions plus développées comme ‘Ennemis’ et sa dynamique basée sur des changements de rythmes, ‘Voices’ avec sa froideur gothique et son riff en tapping à la Gojira ou ‘Awakening’ et ses intervalles de respiration, viennent apporter une diversité bienvenue dans un album monolithique par sa cohésion. Les mélodies ont plus de mal à s’extraire de ce magma et l’auditeur friand d’un peu de douceur harmonique devra se concentrer sur les refrains de ‘Stadium Slavery’ et ‘Intolerance’ pour se sustenter.
Pour profiter de la métaphore que nous offre le titre de l’album, il faut être dans un état d’esprit particulier pour se lancer dans l’écoute de l’album de Leahtan. Si vous avez de l’énergie à revendre et que vous désirez entrer en résonance avec une source inépuisable, alors "State Of Mind" est le référentiel adéquat. Presque aussi efficace qu’une séance de course à pied, la musique de ce disque à la grande vertu d’atténuer les maux de l’esprit en rendant possible la vibration des muscles du corps, et d’en atténuer toutes les pesanteurs.