Revoilà ceux qui sont en passe de devenir le duo russe préféré de la rédaction de Music Waves (il suffit de lire les chroniques sur leurs précédents albums pour s'en convaincre) : Marjana Semkina et Gleb Kolyadin reviennent avec le quatrième album d'Iamthemorning, "The Bell", un disque inspiré sur le plan musical par la musique du XIXème siècle et l'Angleterre victorienne et pour les textes par les différentes formes que peut prendre la cruauté humaine et le chagrin qu'il en résulte.
Autant dire que pour ceux qui connaissent le groupe, il ne faut pas s'attendre à des bouleversements majeurs dans la musique qui caractérise Iamthemorning. On retrouve avec plaisir des compositions dégageant un charme indéniable par ce mélange de pop (mélodies assez faciles à mémoriser) et de musique d'inspiration classique (les arpèges de piano), parsemées de petites touches d'heavenly (le chant aérien) et de progressif (les digressions vocales et instrumentales qui viennent se glisser soudainement au beau milieu ou à la fin d'une chanson toute simple), ces deux derniers éléments s'avérant cependant moins présents que sur l'album précédent.
La beauté de "The Bell" repose sur l'alchimie qui se crée entre un chant féminin apaisant et pur et des arpèges de piano à queue fédérateurs : plusieurs titres se résument à ce piano/voix envoûtant ('Blue Sea', 'Black and Blue', 'Song of a Psyche', Lilies', 'The Bell') et dénué de toute mièvrerie. Le duo se met au service de mélodies lentes et mélancoliques qui happent facilement l'auditeur, nappées de quelques effets créés par des instruments exogènes (le sax sur 'Freak Show', la trompette et l'accordéon de 'Salute', la guitare électrique qui s'offre deux courts solos sur ces deux mêmes titres).
Chaque titre en soi est une petite bulle mélodique, mélancolique, apaisante et fort agréable à écouter. Si l'album peut paraître parfois un petit peu trop homogène, cette impression est plus due à la relative quiétude qu'installe cette succession de petites perles qu'à une trop grande linéarité des compositions. Au contraire, le duo s'ingénie à introduire beaucoup de diversité dans ses chansons, variant les rythmes, se faisant tantôt jazzy, tantôt cabaret ('Salute'), tantôt carrément classique ('Lilies').
Il faut souligner une nouvelle fois la performance de Marjana Semkina dont les lignes vocales gracieuses sont un véritable baume pour les oreilles de l'auditeur et Gleb Kolyadin dont le piano est une source d'enchantement. Pour qui apprécie la subtilité, la douceur, la beauté d'une ligne de piano ou d'un chant qui cherche plus à convaincre par l'émotion et la fragilité que par la force, pour qui n'est pas addict au martèlement des percussions ou aux solos débridés des guitares électriques, celui-là trouvera certainement beaucoup de plaisir à l'écoute de ce havre de paix.