Faut-il encore présenter Alan Simon, auteur de nombreuses fresques dont la célèbre tri/tétralogie "Excalibur" (qui bientôt deviendra pentalogie !) ? A la fois compositeur, chef d'orchestre, metteur en scène et interprète, le Nantais d'origine nous revient régulièrement avec de nouvelles histoires sous le bras, mises en musique avec le concours de nombreux interprètes et musiciens de talent.
Mais, en cette année 2019, Alan Simon s'attaque à l'Histoire avec un grand H, celle qui a construit la France d'aujourd'hui au fil d'épisodes pas toujours très glorieux. Et le moins que l'on puisse dire, c'est que la page douloureuse de la chouannerie, positionnée dans les premiers temps de la Révolution et de la République, se révèle particulièrement sale, pour ne pas dire plus.
Pour mettre tout ceci en musique, et également en scène, Alan Simon a pioché moins qu'à son habitude dans son carnet d'adresses d'instrumentistes, auxquels il a cependant adjoint un bagad mais aussi un orchestre symphonique au grand complet. Sans surprise, les différents titres nous proposent comme à l'accoutumée des mélodies soignées et accessibles, auxquelles sont adjointes aussi bien des orchestrations foisonnantes et luxuriantes que quelques notes lumineuses de piano solo, quand ce ne sont pas des riffs électriques puissants qui viennent souligner le climat de terreur évoqué par les différents interprètes. Le tout est saupoudré d'instrumentations celtes, harpe et bagad en tête d'affiche.
Mais au-delà de ces musiques hyper-travaillées, c'est bien du côté de l'Histoire que de nombreuses fois le cœur se serre à réception des paroles sans fard qui percutent l'auditeur. Majoritairement masculins, les personnages clés de l'histoire sont personnifiés par des interprètes au charisme évident, ce qui donne encore un peu plus de force à ces vers sombres. En tête de gondole, la famille Descamps (le père, le fils … et non, pas le Saint Esprit mais le frère Francis !) dont les différentes apparitions sont autant d'uppercuts musicaux, avec une mention spéciale à Tristan dont les talents d'interprète sont de plus en plus bluffants. Mais on soulignera également la qualité des voix féminines dont certaines montées dans les aigus collent de véritables frissons le long de l'échine.
Dans ces ambiances peu propices à la rêverie, Alan Simon parvient toutefois à nous générer de véritables émotions musicales, avec un talent de mélodiste et d'orchestration toujours aussi incroyable, chaque note semblant pesée à l'aune de ses congénères. Et là où nombre d'opéras rock ne prennent leur dimension que sur scène, cette restitution du spectacle sous sa forme uniquement musicale se révèle une véritable réussite et s'écoute comme n'importe quel album studio.
Le mot de la fin reviendra à l'immense Jean-Claude Dreyfus, dont la déclamation extraite de "La Légende des Siècles" de Victor Hugo vient ponctuer avec force cette page douloureuse. De notre côté,nous n'aurons qu'un seul message à transmettre : merci Monsieur Simon, avec un grand M et un grand S.