Cinq années se sont écoulées depuis la parution de "The Road of Bones", album considéré à l'époque comme le plus noir de la discographie du groupe. Pour cette nouvelle production, Mike Holmes avait annoncé la couleur : dans la continuité de la démarche entamée avec "Frequency", le groupe allait continuer à durcir le ton et proposer encore plus de gros son.
Et pour ce qui est du gros son, le contrat est rempli au-delà de toute espérance, sans toutefois migrer vers le metal qui ferait fuir les aficionados du groupe. La production est tout simplement énorme, mettant en valeur des guitares agressives à souhait, surtout sur les quatre premières plages. Mais ce qui frappe dans toute cette première partie, c'est l'énorme présence de Paul Cook derrière les fûts, pour une performance que l'on n'aurait pas imaginé chez ce vétéran revenu en 2014 de sa retraite musicale et de sa passion pour la pêche ! Ainsi, l'entame musclée de 'Resistance', la superbe montée en puissance de 'Rise' et ses fabuleux chorus avant l'apaisement final, ou encore 'Stay Down' et sa deuxième partie fulgurante immergent l'auditeur dans un univers à la fois bien balisé par le groupe depuis de nombreuses années, mais toujours aussi particulier.
Tout ceci n'empêche pas quelques digressions, comme par exemple l'entame orientalisante de 'Alampadria' avant de retrouver les rythmiques impaires si chères au groupe, mais aussi un clin d'œil appuyé vers Pendragon au travers d'un solo de guitare que ne renierait pas l'ami Nick Barrett ('Shallow Bay'). Seul léger bémol au milieu de cet océan de plénitude musicale, la ballade acoustico-électronique 'If Anything' semble quelque peu déplacée, surtout positionnée avant le premier titre epic de l'album, l'excellent 'For Another Lifetime' qui du haut de ses 15 minutes bien architecturées autour des basiques du groupe vient ponctuer de fort belle manière cette première partie.
Initialement prévu comme un disque bonus d'une future édition limitée, le deuxième CD a finalement été officiellement intégré au package, et le moins que l'on puisse dire est qu'il eût été dommage de priver une partie des acheteurs d'un tel plaisir. En effet, cette deuxième partie nous renvoie quelques 20 années en arrière, à l'époque d'"Ever" et encore plus de "Subterranea". Les deux plages épiques de plus de 20 minutes chacune nous retournent l'image d'un groupe à la maturité impressionnante, multipliant les thèmes et les ambiances, rendant totalement envoûtante l'écoute de ces 55 minutes soyeuses à souhait, concentré de ce que le néo-progressif peut offrir de meilleur.
Voilà maintenant près de 40 années qu'IQ porte haut et fort ce courant progressif que l'on continue malgré tout de qualifier de néo. Si les ingrédients n'ont que peu varié au fil des années et des parutions d'albums, force est de reconnaître que le groupe maîtrise à merveille l'art de les accommoder pour en faire des mets succulents pour nos oreilles. Et ce n'est pas ce "Resistance" qui nous amènera à prétendre le contraire.