Si les Polonais de Tides From Nebula nous ont habitués à se distinguer du lot des groupes de post rock, c'est avant tout grâce à une audacieuse vision créative et à une personnalité bien affirmée. Explorant différents horizons du genre, ils en re-dessinent les contours à chaque production. Cette dernière est donc attendue avec impatience et le résultat est, ne le cachons pas plus longtemps, bluffant.
Le virage electro-post-rock entamé avec "Safehaven" conduit désormais le trio vers une musique très personnelle. Les claviers modernes se mêlent aux guitares plaintives et aux rythmiques hypnotiques en début d'exercice sur 'Ghost Horses' alors que 'The New Delta' concentre toute l'originalité du groupe, à mi-chemin entre Long Distance Calling et Daft Punk période "Tron Legacy", référence electro-pop que l'on retrouve sur 'Radionoize' dans une veine plus classique toutefois. Et l'alchimie prend aux tripes tout comme cette petite mélodie saupoudrant ses notes cristallines sur les guitares heavy de Maciej Karbowski.
Mais Tides From Nebula fait encore plus fort avec un ‘Dopamine’ qui porte parfaitement son nom. Cette hormone du plaisir nous est distillée sans modération par un riff electro post techno à la Pretty Lights sur fond d'arpèges enivrants avec une rythmique endiablée. Il y a tout de même des passages plus sombres et plus typiques du post rock "conventionnel" tel que les natifs de Varsovie le pratiquaient en début de carrière. Ainsi, 'Nothing to Fear and Nothing to Doubt' apporte une touche plus sombre avec ses montées progressives et ses ajouts d'éléments sonores à chaque groupe de mesures.
Mais il ne suffit pas d'insérer des claviers electro sur du post rock pour s'en démarquer, encore faut-il le faire avec intelligence et talent, comme sur le lumineux titre éponyme 'From Voodoo To Zen' où la batterie virevoltante de Tomasz Stolowski est enveloppée d'un écrin de nappes qui vous embarquent dans une douce rêverie contemplative. Quant au closer 'Eve White, Eve Black, Jane', il résume les qualités d'écriture, de composition et d'interprétation intelligentes et originales du combo sur un tempo lancinant qu'une basse potelée emporte vers un final de guitares cristallines.
La durée de l'album pourra frustrer l'auditeur béat de plaisir mais l'intensité des émotions que ces 46 minutes procurent dès la première écoute la lui fera vite oublier. Tides From Nebula confirme qu'il est un groupe à part dans le paysage post rock. Il en conserve des codes et en crée d'autres avec une authenticité qui les rend uniques. Jamais ennuyeux, ce "From Voodoo to Zen" est une des surprises majeures de cette rentrée chargée, un mélange des styles qui crée un son immédiatement reconnaissable, la marque des plus grands.