Elvia est une artiste protéiforme en ce sens que la musique n'est pas seulement une partie de son art mais une des particules élémentaires. Cet aspect lui est venu un peu sur le tard après avoir travaillé avec des enfants et des personnes handicapées afin de développer leur fibre artistique (art plastique, mode, un peu de comédie...). Nul doute que ces expériences ont nourri son œuvre musicale. C'est aussi une compositrice caméléon qui a connu plusieurs vies en faisant partie d'un groupe et ayant adopté un premier de nom de scène : Milou Leïz.
"Anima" est donc un EP composé de trois titres (seulement) qui sort sous le nom d'Elvia. Ces multiples vies et homonymes en ferait-elle une personne insaisissable ? Ces trois morceaux tendent à démontrer que la chanteuse a bien plus d'une corde à son arc mais dont chacune aurait le même objectif, celui de toucher la cible auditrice en plein cœur. 'Indigo' adopte une couleur pop internationale avec son pré-refrain qui fait écho à Sia avec sa célèbre chanson 'Chandellier' et sa montée en puissance, préambule à un refrain flamboyant qui ici n'atteint pas l'intensité de celui de l'Australienne, Elvia évitant de justesse de tomber dans le piège du copier/coller. Ici la touche est un peu plus orientale dans les intonations (Indila), soulignant un peu plus la personnalité d'Elvia.
L'enfance côtoyée dans la formation professionnelle de notre artiste semble alimenter le projet proposé avec notamment le titre 'Petit Poucet'. Les contes sont souvent terrifiants afin de contribuer à la structuration psychique des enfants. Ici le titre commence par un air angoissant, lourd, grave, accompagné par sa petite mélodie tout droit sortie d'une boite à musique, renforçant cette noirceur chère à Tim Burton. Le refrain apporte son lot de lumière avec des paroles optimistes. La forme rappelle l'excellent projet porté par Franck Harscouët, La Fille d'Octobre et l'album "Hurle-Vent" dans cette interprétation théâtrale (la chanteuse du projet Mallaurie Duffaud étant comédienne à la base). Enfin 'O De Vie' se fait un peu plus classique, minimaliste et intimiste avec une contrebasse qui vous ferait croire dans un bar bluesy, celui que l'on trouve dans les films de série noire américaine, dans lequel le détective privé vient soigner sa solitude à grands coups de whisky. Le titre est plus sombre, plus austère, mais le chorus l'enlumine avec une voix puissante.
Si cet univers un peu mystique vous touche, alors n'hésitez pas à vous procurer cet EP de qualité signé d'une artiste qui semble à fleur de peau. Les ambiances pop, théâtrales, classiques un peu sombres collent parfaitement aux thèmes et aux textes proposés, lorgnant vers le monde mystérieux de Mylène Farmer avec toutefois plus de voix, même si parfois la façon de terminer certains mots des refrains à la façon 'orientale' vient tempérer la bonne impression d'ensemble tant Elvia en use et en abuse. Cela ne vient pas gâcher le plaisir d'écoute en espérant pour la suite un EP ou album plus consistant qui viendra gommer cette légère réserve et apportera encore un peu plus de personnalité.