Nous aimons Altar Of Oblivion. D'une façon inconditionnelle. Pour son heavy doom épique qui n'appartient qu'à lui, mordant, racé et funèbre tout ensemble. Pour le chant de Mik Mentor, puissant vecteur d'émotions. Pour l'écriture ciselée du guitariste et fondateur Martin Meyer Mendelssohn Sparvath dont les textes, par ailleurs, puisent dans l'Histoire la gravité et la profondeur que réclame le genre.
Nous regrettons en revanche sa faible productivité (trois albums en quinze ans, c'est maigre) mais cette rareté ne rend que plus précieuses ses offrandes dont la courte durée, qui plus est, leur confère des allures de trésors qu'il convient de savourer, de déguster, en sachant qu'il faudra ensuite patienter de longues années avant de pouvoir découvrir de nouvelles compositions de ces Danois à l'identité unique.
Sept ans séparent donc "The Grand Gesture Of Defiance" de "The Seven Spirits", long silence toutefois brisé par l'EP "Barren Grounds", forcément trop avare pour combler ce vide. Mais, eu égard à l'immuable qualité de son art, nous pardonnons toujours au groupe son manque de prodigalité. Ainsi, les cinq minutes et trente-six secondes que dure 'Created In The Fires Of Holiness', amorce aussi nerveuse que flamboyante de ce nouvel opus, suffisent à nous faire oublier ces années de disette. L'envoûtement opère tout de suite, le plaisir d'écouter Altar Of Oblivion demeure intact. Cette porte d'entrée inaugure un menu plus sombre et majestueux encore.
Comme son titre le suggère, sept pistes le découpent, racontant chacune une histoire embuée d'un sang tragique. La rédemption et le remords commandent de sombres atmosphères que bâtissent des guitares robustes cependant que la voix de Mik Mentor étend un suaire de désespoir auquel il semble bien difficile de ne pas succomber ('No One Left'). Irrigué par ces lignes vocales empreintes d'un lyrisme sentencieux, "The Seven Spirits" nous plonge dans un monde en ruines où le fond de tranchées agressives est tapissé de claviers brumeux ('Gathering At The Wake').
Les Danois brillent par leur science de l'accroche à la fois plombée et émotionnelle, témoin ce 'Solemn Messiah' que la six-cordes pousse en fin de parcours dans un puits de tristesse alors que le terminal 'Grand Gesture of Defiance', qui n'est pas une reprise de l'album du même nom, illustre la noblesse de ce doom dont la beauté solennelle ne freine pas l'efficacité. Le fait que l'opus soit, à l'instar de ses devanciers, trapu, ne franchissant que de peu la barre des quarante minutes, loin de le vider de sa sève, participe au contraire de sa force.
Fidèle à sa signature, Altar Of Oblivion a soigné son retour avec "The Seven Spirits", porté par le même élan épique et cendreux que ses prédécesseurs.