La guitare instrumentale… En voilà un style musical où l’on trouve beaucoup d’appelés mais peu d’élus… En effet, après l’hécatombe qu’a connu le camp des « guitar heroes » durant les années 90 avec l’arrivée du grunge notamment, le shred a bien reculé à cette époque mais il semble se profiler plus récemment un regain de productions et de nouveaux artistes (l’intérêt du public ne suit malheureusement pas de manière systématique) dans ce style relativement confidentiel. Cependant, en la matière, presque tout a été fait et il est très difficile d’être original…
Marco Ferrigno, guitariste mexicain, s’est apparemment fait un nom au travers du projet « Promised Land » aux côtés de Vitalij Kuprij (Artension / Ring Of Fire). A la suite de ce projet, Marco s’est donc lancé dans la composition de son album « Hanging Gardens » qu’il nous livre ici. Il s’adjoint notamment la collaboration de Tony Franklin à la basse, Marco Minnemann aux fûts et Javier Leal intervient également en « guest » aux claviers sur les titres « Tower Of Babel » et « Secret Garden ».
Le style général est donc bien de l’instrumental axé profondément sur la gratte. Celle-ci est très typée néo-classique dans la plupart des phrasés. Le son et le jeu font inévitablement penser à du Malmsteen, notamment par la coloration harmonique mineure qui le caractérise sur certains plans. Néo-classique, oui mais pas seulement car à ce penchant dominant se superposent diverses ambiances musicales en arrière plan.
L’arrière plan (sans que cela soit péjoratif bien entendu) et en effet très travaillé. Les rythmiques sont souvent très variés et entretiennent une certaine curiosité chez l’auditeur. On peut ainsi se concentrer sur l’écoute des rythmiques plutôt que sur le lead…
En ce qui concerne l’interprétation instrumentale, elle est bien évidemment de qualité. Cependant, comme dit précédemment : ici, rien de nouveau sous le soleil… Malheureusement, on sent que des thèmes ont été développés mais ils sont noyés dans la profusion de plans techniques qui déboulent au détriment du feeling et de la recherche mélodique quelquefois, ce qui n’apporte pas grand chose… Les mauvais penchants du shred.
L’album dure moins de 45 minutes pour 8 titres : comme je l’ai déjà dit dans une précédente chronique, je pense qu’en dessous de 50 minutes, un album est assez court, d’autant plus quand on sait que ce support peut contenir jusqu’à près de 80 minutes…
« Temple Of Time » commence avec un intro douce, sur fond de nappes de synthé, qui accélère très vite en descentes de gammes à la Yngwie avant que déboule une rythmique assez efficace variant les figures tout au long du morceau pendant que des thèmes lents se succèdent à des phrasés très rapides comme parfois un jeu de questions-réponses.
« Night In Babylon », comme le suggère son titre, prend des accents orientaux dès le départ avec une belle intro aux claviers. Là aussi entre en action la section rythmique qui enchaîne les variations de figures rythmiques. Le penchant néo-classique se marie ici très bien avec l’inspiration orientale du morceau.
« Tower Of Babel » démarre tout en douceur de manière assez crémeuse mais nous amène après quelques progressions rapides vers des passages plus jazzy (qui ne durent pas cependant, que les adeptes du néo-classique soient rassurés) alternant avec des passages néo-classiques avant de terminer par un refrain à la « Liberty » de Steve Vai.
« Sacred City » fait penser un peu à « Night In Babylon » par son thème un peu arabisant grâce à l’usage bien maîtrisé du bending.
« Meditteraneo » démarre par la section rythmique qui introduit le thème de la guitare et jongle ensuite avec elle sur les plans qui suivent. On note ici aussi un intermède un peu oriental également aux claviers, suivi d’un passage de basse bien dosé.
« Secret Garden » est introduit par une basse, apparemment fretless, jouant sur les harmoniques avec un phrasé très langoureux qui appelle la guitare à la suivre sur ce terrain mélodique. De jolies mélodies sont à cueillir dans ce jardin secret avec notamment l’intervention d’une guitare acoustique flirtant avec le flamenco avant qu’un passage jazz s’invite…
« Varanus Komodensis » déboule d’entrée de jeu avec une succession d’arpèges en sweeping très techniques mais fluides. La suite des choses est en total accord avec le reste de l’album : succession de thèmes auxquels on se raccroche avant d’enchaîner sur des phrasés très speed.
On termine sur « Closer To The Wind » qui reprend en conclusion tous les précédents ingrédients développés auparavant.
Pour conclure, voilà un album qui ravira donc les amateurs de guitare typée néo-classique et orientée shred mais décevra ceux qui attendent de la nouveauté, de l’originalité et de l’innovation… Et oui, on attend toujours !