Depuis 2008, les Parisiens de Betraying The Martyrs (BTM) naviguent entre metalcore et deathcore, saupoudrant leur musique d’electro ou d’envolées symphoniques. Leur précédent album “The Resilient” avait été bien accueilli, même si certains lui reprochaient de ne pas prendre assez de risques. Depuis, Lucas D’Angelo a laissé sa guitare à Steeves Hostin (Beyond The Dust et Uneven Structure). La formation ragaillardie par ce nouveau venu propose un “Rapture” entre douceur et fureur. Mais Betraying The Martyrs a le bon goût de suivre les canons d’un genre, tout en ayant l'intelligence de les transgresser...
‘Rapture’ propose d'entrée une guitare intense et des rythmes fouillés (des réminiscences de Beyond The Dust ?). Mais avant cela, l'introduction pleine de synthétiseurs apporte une froideur robotisée et de doux arpèges apaisent, avant que la batterie trépidante ne fasse monter la température. Néanmoins au-dessous de la puissance s’épanouissent les quelques notes intimistes et presque rassurantes d’un piano dépouillé : la formation tisse un fil ténu sur lequel l’œuvre repose en équilibre.
Certaines chansons basculent dans l’intensité oppressante du deathcore. C’est le cas de ‘Incarcerated’ où les vocaux rêches associés au chant clair serein font des merveilles. ‘Monster’ poursuit avec la même rage vissée au ventre, le même grunt intense, alors que le chant clair est plus direct. La surprise est au rendez-vous lorsque le disque affiche une complexité rythmique proche du djent (Beyond The Dust ou Meshuggah), puis sans coup férir expulse des giclées de hargne proches de Carnifex ou Cannibal Corpse. Le groupe, jamais avare de variations, construit un passage de piano qui ressemble à s’y méprendre à Muse (‘Butterfly and Hurricanes’).
‘The Sound Of Letting You Go’ mêle l’émotion simple à une construction symphonique et une voix chaude proche de The Amity Affliction ou Linkin Park. Toujours pour prendre l’auditeur à son propre jeu, le rythme s’accélère, puis se ralentit, enterrant définitivement les auditeurs sous des tonnes de guitares acérées. Ce goût de la mélodie se retrouve dans les guitares solitaires qui apportent un contrepoint harmonique (‘The Sound Of Letting You Go’ et ‘Eternal Machine’). Enfin le groupe assume son héritage extrême et death oldschool, notamment lorsque la voix caverneuse de ‘Down’ rappelle Frank Mullen (ex. Suffocation) ou Gorod, ou lorsque la batterie propose des blasts infernaux nés chez Morbid Angel.
Même si “Rapture” ne renouvelle pas le genre, il affiche une passion musicale palpable qui charme à la vitesse de la lumière. Entre rythmes assassins, mélodies prenantes et intensité percutante, BTM ne veut pas choisir. La douceur des mélodies, l’acidité du chant âpre et les rythmes étouffants jouent alors à armes égales. L’amateur de deathcore se gavera jusqu’à plus soif de sa fureur brutale, le fan de djent de ses variations techniques et de son souci du détail, alors que l’amateur de mélodies raffinées y jettera une oreille attentionnée... si bien qu’au final tous seront comblés.