Il
y a deux ans apparaissait sur la scène du metal mélodique un nouveau
trio sorti d'on ne sait quel esprit adepte des paris de chez
Frontiers. Réunir un guitariste suédois, un chanteur chilien et un
batteur américain aurait pu interroger les non-initiés. Mais les
connaisseurs ne purent qu'afficher un sourire de contentement
lorsqu'ils surent que les représentants de ces nations avaient leur
portrait sur les murs de leur chambre. Pensez donc, associer Magnus
Karlsson, Ronnie Romero et Mike Terrana, ça frise le brelan d'as.
L'album éponyme de The Ferrymen plut, mais ne reçut pas les lauriers qu'on aurait pu
attendre de la réunion d'une telle confrérie. Manque d'originalité,
mélodies trop faciles, dirent-ils.
2019
voit survenir la seconde offrande de la bande. "A New Evil" est son nom
de baptême. Le divin compositeur/guitariste suédois au CV long
comme le bras (Allen/Lande, Primal Fear, Place Vendome,
Kiske/Sommerville...), le céleste chanteur chilien - choisi par
Blackmore himself pour tenir le micro au sein de son Rainbow
renaissant - et l’inénarrable batteur américain (Axel Rudy Pell,
Rage, Masterplan, Tarja, Malmsteen...) vont-ils clouer le bec aux
quelques mauvais coucheurs qui avaient fait la moue à l'écoute de
leur premier essai ? Ouvrons les oreilles et parcourons
attentivement la bête.
Pour
commencer, évoquons les caractéristiques vocales du frontman. Voilà
qui guidera inévitablement ceux qui s'interrogent sur les
correspondances de style musical. Romero, comme c'est étonnant,
chante comme Dio. Blackmore a visiblement toujours l'oreille et il
semblerait, pour lui avoir proposé de le rejoindre chez Rainbow,
qu'il regrette encore aujourd'hui les années passées à côté de
Ronnie James. La ressemblance est suffisamment probante pour qu'on
puisse avancer que le hurleur chilien pourrait interpréter à l'aise
le répertoire du regretté chanteur. Ainsi, The Ferrymen pour cette
première raison, évoque le metal épique de l'interprète disparu. Déjà neuf ans...
Une
autre marque de fabrique de The Ferrymen provient de son compositeur : Karlsson marque de son sceau si particulier
toutes ses participations. On reconnaît ce Monsieur les yeux fermés.
Et en se penchant sur le combo on a l'impression d'écouter ce
que proposent le binôme Allen/Lande et Michael Kiske chez Place
Vendome ou lorsqu'il est associé à Amanda Sommerville, mais en version metal.
Car
pour envoyer du lourd question rythmique, autant dire que le trio ne
tourne pas le dos à ses responsabilités. Et si les claviers
judicieux du Suédois tempèrent parfois ses élans de manche,
la plupart du temps ils sont rayés de la carte par les déferlantes
de sa six-cordes : juste impressionnant ! Terrana matraquant ses fûts
comme un malade - la puissance de sa frappe est monumentale - et
Romero poussant les feux jusqu'à l'extinction de voix, il va de soi
que personne ne risquera de piquer un somme à l'écoute du produit.
Si vous voulez du metal mélodique épique, vous allez être servis !
Mélodiquement
parlant, c'est également du haut niveau. Les ambitions de puissance ne laminent
aucunement les inspirations mélodieuses. Là aussi nous n'avons pas
affaire à des ingrats. Tout est peaufiné avec talent. Tous les
titres possèdent des lignes mélodiques prenantes. Bien entendu,
certains morceaux méritent dans ce domaine plus de lauriers que
d'autres, mais ce n'est là vraisemblablement qu'une simple question
de sensibilité. Gageons tout de même que les exceptionnels 'Heartbeat' et 'No Matter How Hard We Fall' mettront tout le monde
d'accord. Mais pourtant que dire du titre éponyme et de 'Don't Stand In
My Way' ? De 'Bring Me Home' ou de 'The Night People Rise' ? Autant
de bien à n'en pas douter.
Cet
album est un coup de pied aux fesses sur pattes (sur pistes?). Il
vous emportera dans son maelström de sons d'une puissance étourdissante et de mélodies d'un pouvoir addictif consumant. Ne passez surtout
pas à côté de ce rubis si vous aimez les groupes de mouvance
métalo-mélodique. Pétard, quelle baffe !