Tout d'abord présenté comme l'un des side-projects de Leif Edling, Avatarium tend peu à peu à couper le cordon avec la tête pensante de Candlemass, afin d'exister par lui-même. Chaque nouvelle offrande voit ainsi la griffe du légendaire bassiste s'effacer au point de voir son rôle désormais réduit à un simple patronage.
Bien qu'il ne fasse officiellement plus vraiment partie du groupe, son influence n'en reste pourtant pas moins prégnante, moins pour les compositions - de plus en plus rares - qu'il signe encore que par son style reconnaissable entre mille dont se réclament les autres musiciens. Toute la difficulté pour ces derniers réside aujourd'hui dans leur capacité à faire évoluer, sans pour autant la dénaturer, cette identité très particulière que Eidling a fixée, à savoir cet alliage ensorcelant entre l'élégance d'un chant féminin et la puissance volcanique de guitares coulées dans le plomb, le tout nappé d'effluves progressives échappées des années 70.
L'écoute de "The Fire I Long For" témoigne que le patriarche de la chapelle doom suédoise a eu raison de se mettre en retrait afin de laisser Avatarium voler de ses propres ailes car cela a permis à ce dernier de s'affirmer dans sa dimension collective et plus seulement comme le fruit de l'association entre le bassiste et le guitariste Marcus Jidell (Evergrey, Royal Hunt...).
Ce quatrième opus voit la palette des Suédois s'enrichir de couleurs à la fois plus psychédéliques, à l'image du tendre 'Lay Me Down' ou plus étranges voire bruitistes (les dernières mesures de 'Shake That Demon'). Contre toute attente, le groupe n'a pourtant peut-être jamais sonné aussi doom, porté par une guitare grosse comme une poutre, ce qu'illustre d'emblée le terrassant 'Voices'. Mais toujours, des traits moelleux, que véhiculent claviers chamarrés et vocalises cristallines, viennent adoucir la dureté de ces enclumes engluées dans le magma ('Porcelain Skull').
L'émotion n'est pas éconduite d'un ensemble où les soli de Marcus Jidell ('Great Beyond') rivalisent de majesté avec la voix puissamment dramatique de Jennie-Ann Smith ('Stars They Above', conclusion squelettique belle comme un chat qui dort). Ecriture et arrangements sont d'une très grande qualité, ce que symbolise admirablement le brumeux 'Epitaph Of Heroes', longue pièce progressive et incontestable point G de l'album. Rencontre entre le Rainbow de l'ère Dio et un chant féminin aussi solennel qu'habité, l'identité du groupe se voit magnifiée par ces sept minutes heavy et envoûtantes, sombres et tragiques.
Avec "The Fire I Long For", Avatarium s'affirme à la fois comme un groupe à part entière, affranchi de la présence tutélaire de Leif Edling, tout en s'inscrivant sur la durée comme une des figures majeures d'un doom alliant l'impétuosité du hard rock à la flamboyance soyeuse du progressif.