Rares sont les artistes qui font preuve d’autant de précocité et d’éclectisme que Junior Rodriguez. Débutant sa carrière à quatorze ans quand d’autres ne se posent pas encore la question de leur avenir, le Français s’est construit au sein de groupes dits extrêmes avant d’accompagner des artistes aussi différents que Dick Rivers ou Betraying The Martyrs avec son instrument de formation, la batterie. Un temps installé aux Etats-Unis, Junior en profite pour travailler avec Dave Grohl et le producteur Alain Johannes (Queens of the Stone Age, Arctic Monkeys). Son dernier projet est un album solo baptisé "Stellar Dream" pour lequel Junior n’a pas hésité à voyager de la Namibie à l’Islande pour y puiser l’inspiration.
En lisant ces quelques lignes il est presque impossible d'avoir l'intuition de quelle nature relève "Stellar Dream". Une fois de plus Jr est là où on ne l’attend pas a priori et s’inscrit dans une filiation 70’s de rock psychédélique qu’il avait commencé à défricher dès 2014 avec ses deux EP "Welcome Home". Cinq ans plus tard, Jr cherche un nouveau souffle et part en compagnie du réalisateur Albéric Jouzeau et du droniste Benjamin Loriou pour un road trip en Islande. L’expérience est immortalisée sur une mini-série de dix épisodes courts aux sublimes photographies. La série donne son nom au morceau inaugural ‘Starting From Nowhere’ et les impressions glanées en terre islandaise nourrissent une partie de son contenu. Ce premier morceau aux intonations solennelles rappelant The Cult, son côté immersif renforcé par les nombreuses sonorités et bruits de nature issus de l’aventure islandaise et ses mutations vers le trip-hop donnent une partie du ton psychédélique que revêt le disque.
Mais par sa forme générale et son développement évolutif, il demeure néanmoins assez singulier puisque le reste du disque se répartit majoritairement sous la forme de heavy à la tournure fuzz et stoner avec des temps de repos plus légers de pop accessible et directe. Que Jr s’oriente dans l’une ou l’autre de ces directions, le résultat porte sa signature et permet au disque de jouir d’une grande unité. Parmi les temps forts, on peut citer ‘Stellar Dream’ au riff sabbathien et à l’emballement final, la tournure éthérée de ‘Dali Was A Liar’, les magnifiques thèmes mélodiques de ‘Sur les Toits de Montréal’ ou ‘Pissed’ qui célèbre les noces de Foo Fighters et Queens of The Stone Age. Ces brûlots s’entrecroisent avec des chansons à l’écriture plus intimiste comme ‘Be My Guest’ et ‘My Love, My Friend’ qui déclenchent la nostalgie pour les années 80, ou carrément pop avec ‘Just Like You’ dont le clip tourné en Namibie raconte une jolie histoire.
"Stellar Dream" est une carte postale sonore qui restitue les atmosphères et les impressions ressenties par Junior Rodriguez dans ses multiples pérégrinations vagabondes. C’est aussi une carte de visite de la diversité de ce que peut proposer le Français dans son écriture. "Stellar Dream" est un disque de rock multi-facettes qui s’écoute avec plaisir, un simple casque sur la tête, ou en concert, agrémenté de tout l’appareillage visuel pour rendre l’expérience encore plus intense.