‘The Hate Is Real’. Le titre du dernier morceau de "Carnivore" est on ne peut plus clair. A 62 balais, la haine de Ice-T est toujours intacte. Et ce nouvel album de Body Count est là pour nous le prouver. Après trente ans d’une carrière en dents de scie, les hérauts du rap metal en ont encore sous la pédale de distorsion et nous balancent à la figure un pavé dont ils ont le secret. Sauvage, puissant et dopé aux stéroïdes, le septième opus du groupe est d’une efficacité redoutable.
L’énorme ‘Carnivore’ qui ouvre l’album est la synthèse parfaite du savoir-faire des Américains. Un riff qui tabasse, un chant rap revendicatif qui dézingue la sauvagerie de la nature humaine et un excellent solo heavy. La fusion rap metal parfaite et le titre à mosh pits idéal. D’ailleurs, tous les titres de "Carnivore" sont taillés pour la scène. Les Californiens nous offrent dix brûlots sans concession destinés à flinguer les cervicales et à prouver à qui veut l’entendre que c’est dans les vieux pots qu’on fait la meilleure recette metal, celle qui sent la sueur et l’odeur aigre des lampes des amplis chauffées à blanc.
Alors bien sûr, les éternels tics de Body Count sont toujours là, notamment cette habitude un peu énervante de présenter certains morceaux au travers d’introductions parlées. Mais cela rajoute aussi à l’évidente sincérité d’Ice-T. Il est donc difficile de lui en vouloir, surtout lorsqu’il s’agit de rendre hommage à Lemmy, en introduisant une reprise particulièrement réussie du ‘Ace Of Spades’ de Motörhead, ou au rappeur Nipsey Hussle, assassiné pendant l’enregistrement de l’album (‘When I’m Gone’).
La formule Body Count est maintenant bien huilée et le groupe fait ce qu’il sait faire le mieux : des riffs lourds comme le plomb (‘No Remorse’), du bon gros thrash burné à la Slayer (‘Point The Finger’, ‘The Hate Is Real’) ou à la Pantera (‘Thee Critical Beatdown’), et un nouvel emprunt au répertoire rap de son leader avec le titre ‘Colors’ sur lequel Dave Lombardo, ex-batteur de Slayer, est invité à marteler les fûts avec toute la puissance qu’on lui connaît. Mais malgré tout, Body Count arrive à nous surprendre avec un duo inattendu entre Ice-T et Amy Lee sur l’excellent ‘When I’m Gone’, auquel la chanteuse d’Evanescence apporte un refrain mélodique jamais entendu auparavant dans les compositions du groupe.
Avec "Carnivore", Body Count remet le rap metal au premier plan et se pose en leader du genre qu’il domine de la tête et des épaules. La concurrence, notamment Rage Against The Machine qui annonce sa reformation pour cette année, est prévenue.