En 1999 (eh oui, plus de vingt ans !) apparaissait un curieux objet dans la dimension progressive hexagonale : un groupe français et francophone, sans bassiste mais avec une war-guitar, sans batteur mais avec un percussionniste joueur de marimba, sans clavier mais avec un instrument unique au monde : la léode. Lazuli n’allait pas tarder à faire parler de lui, débordant les frontières gardoises puis nationales. Le remplacement de le section rythmique dix années après l’éclosion n’enrayera pas la progression du quintet qui garde une identité particulière, identité qui continue à s’affirmer avec l’arrivée du premier album-concept des Gardois : "Le Fantastique Envol de Dieter Böhm" (c’est également leur premier vinyle, sorti dans une présentation magnifique).
Le concept pourrait se résumer à "naissance et vie d’une chanson", de la conception ('Les Chansons Sont des Bouteilles à la Mer’) aux émotions ressenties par Dieter Böhm, auditeur lambda ('L'Homme Volant'). Le concept est comme à l’habitude excellemment bien mis en paroles et renforcé par le soin apporté aux liaisons entre les morceaux. La production, impressionnante, rend hommage aussi bien à l’énergie délivrée qu’à la finesse des arrangements. Avec le temps, les deux derniers venus ont pris une place essentielle dans le groupe. Romain apporte une multitude d’arrière-plans, des introductions dignes de Vangelis ('Dans les mains de Dieter', 'Mers Lacrymales’) et montre un joli toucher sur 'Baume', tandis que Vincent amène de la finesse dans l’utilisation de percussions électroniques judicieusement disséminées mais aussi une puissance dynamisante à la batterie (sans parler de son utilisation emblématique au marimba). Lazuli ainsi arrive à un équilibre remarquable, les "anciens" jouant le rôle qu’on leur connait, Claude à la léode (bel envol sur 'Un Visage Lunaire'), Gédéric impeccable dans ses interventions de guitare ('Dans les Mains de Dieter') et Dominique vocalement subtil et même fragile sur 'Baume'.
Chacun apporte ainsi sa pierre à un édifice qui reste une valeur très sûre. Même s’il ne bouscule pas ses codes, tout en gardant ses marqueurs attachants, Lazuli accouche d’un opus qui relance une machine qui menaçait de tourner en rond, les deux derniers opus recyclant sans vraiment renouveler. Cet "Envol" est probablement le disque le plus abouti des Gardois, montrant un groupe homogène et en pleine possession de ses moyens et de son originalité.