Alors que Toundra s’est installé comme l’un des fers de lance du heavy post rock des années 2010, les Espagnols prennent un virage atmosphérique et cinématographique inattendu. Leur nouveau terrain de jeu ? Une bande originale sur le thème du “Cabinet du Dr Caligari”, considéré comme le premier véritable film d’épouvante et sorti il y a exactement 100 ans en 1920. Hommage.
La bande originale revisitée par Toundra s’articule aujourd’hui sur un générique d’introduction et six actes à peu près fidèles au scénario d’origine qui en comporte huit. Elle utilise les codes actuels du post rock atmosphérique rappelant parfois le Anathema le plus introspectif, sur fond de guitares légères et d’une rythmique dépouillée mais bien présente. Le thème principal, assez simple, est décliné dans de nombreuses variations avec quelques montées toujours jugulées par une retenue dans les premiers actes pour coller à l’histoire.
L’ambiance est faussement légère au début puis franchement inquiétante au début du deuxième acte avant de monter (enfin) lentement en puissance, … puis de redescendre (encore). Et c’est ainsi au fil des actes au cours desquels on distingue clairement les différentes scènes puisqu’elles se terminent toutes sur une frustration musicale quand l’énergie contenue que l’on pensait enfin libérée s’éteint brutalement. Cet ascenseur émotionnel constituera certainement un point de discorde majeur entre ceux qui adoreront cette démarche et ceux qui la fustigeront en regrettant le manque d’envolées. La répétition est l’autre point noir de cet album qui, peinant à décoller, reprend les mêmes thèmes tout au long des 73 minutes.
“Das Cabinet Des Dr Caligari” est une œuvre à part dans la discographie de Toundra, un projet personnel des Espagnols en forme d’hommage au cinéma des années 20. C'est aussi un pari risqué qui déroutera les fans du groupe mais ravira les amateurs de post rock atmosphérique d’ambiance. De ce point de vue, l’exercice est réussi puisque l’émotion est au rendez-vous. Mais pour l’apprécier pleinement, il faudra l’écouter en regardant le film d’origine (disponible sur les plates-formes habituelles) et s’apercevoir de la pertinence de la ré-écriture. À prendre pour ce qu’elle est, une BO, au sens strict.