Peu de temps après la sortie de son premier album, Toybloïd connaît un premier schisme. Pierre, le batteur, seul garçon dans cet univers plutôt féminin, se fait la belle. Le duo composé de Lou Sirkis (tiens tiens ! au chant et à la guitare) et de Madeleine Loiseau (basse et également dans le civil, régisseuse lumière) renouvelle sa formule de trio en intégrant le beau Greg derrière les fûts. L'amour à trois serait-il l'amour moderne ? A en juger par sa pochette que certains trouveront peu esthétique, d'autres plus revendicatrice, Toybloïd compose un album concept avec pour dénominateur commun, l'amour. Nous n'aurons pas droit à l'amour sous toutes ses formes mais plutôt aux différentes étapes tracées sur les chemins sentimentaux.
Toybloïd n'aime guère les préliminaires. Si l'album débute par un 'Violence' sur lequel Lou chante a capella, l'ossature punk garage vient très vite tout chambouler. Le trio adopte une formule équilibrée avec des couplets nerveux et des refrains plus énervés. L'amour est un enfant turbulent de Bohème et la voix de Lou nous permet de confirmer cet aphorisme. Elle sait se faire caressante, sensuelle ('Rock 'N' Roll') usant parfois avec brio d'une voix aiguë ('Diamonds') avant de déployer l'instant d'après ses griffes de T-Rex. Les salves de Greg explosent avec tact dans la fureur. La basse de Madeleine est gonflée à bloc, profilant une ombre ténébreuse sur des compositions déjà survoltées ('Shiny Kid', 'Violence', 'Seven'). Avec 'Sunrise', morceau suggéré par le batteur, le trio explore une voie un peu plus pop.
Si le groupe adule L7 qu'il a naguère accompagné, il se retrouve dans une tradition française entre les Calamités (encore un groupe avec des filles et un batteur masculin) et Dragon's Daughters. Malheureusement, Toybloïd est victime de sa nature. La formule ne se renouvelle guère et au fil de l'écoute, les morceaux deviennent très prévisibles. Le groupe aurait dû étoffer son propos avec un peu plus de subtilité. Fidèle à son credo garage, 'Seven', son morceau le plus long, culmine à une durée vertigineuse de 3'16. Et c'est bien dommage car l'atmosphère de ce morceau est un peu plus nocturne avec sa basse et sa cowbell et il était légitime de s'attendre à un peu plus d'ambition. Enfin, le groupe cultive avec maladresse des influences inconciliables. 'Diamonds' serait inspiré de Rihanna, de quoi donner de l'urticaire aux rockeurs et de faire s'envoler la crédibilité de Toybloïd si ce genre d'inspiration venait à s'éventer.
Porté par la voix tantôt énervée et hypnotique de Lou, la basse grondante de Madeleine et le jeu percutant de Damien, Toybloïd nous prouve que l'amour moderne est de nature explosive et n'attend plus qu'une allumette pour faire sauter le caisson. Malheureusement, le groupe reste un peu trop confiné dans sa formule punk garage ("grunge", a dit Rolling Stone) qui manque quelquefois cruellement de subtilité, donnant à l'ensemble parfois sec un aspect de brouillon.