Scarlean est une formation française qui commence à avoir une belle expérience. Après avoir sorti un premier album, le groupe a partagé la scène avec Mass Hysteria, Disconnected, Bukowski... Naviguant sur un metal alternatif en plein essor dans nos contrées, le combo est revenu avec une nouvelle production en fin d'année dernière intitulée "Soulmates".
Si le groupe met en avant sa collaboration avec Anneke Van Giersbergen pour la relecture de 'Wonderful Life' de Black, cela ne constitue surtout pas la principale attraction de ce nouvel album surprenant. La pochette qui fait presque penser au film 'Hellraiser' (sans les aiguilles) est d'emblée inquiétante et intrigante. Le premier titre confirme l'ambiance sombre générale de l'album. 'Next To The Makers' ouvre la voie à un album plus complexe qu'il n'y paraissait au départ grâce principalement aux arrangements très classieux. La force du groupe réside dans la conviction qu'il ne faut pas rester enfermé dans un style, mais au contraire en combiner plusieurs pour en devenir plus riche. Ainsi ce premier titre pioche dans le metal mais aussi dans le trip hop tout en tutoyant le black et la musique de film à la Burton (les claviers) pour donner un ensemble surprenant.
Si tout cela peut paraître disparate, le groupe rassure en ne cherchant pas absolument l'originalité pour l'originalité, mais en conservant à l'esprit l'aspect chanson des compositions. Scarlean est donc à la fois accessible et suffisamment aventureux pour offrir une certaine fraîcheur à un metal trop souvent sclérosé. Les couplets variés restent souvent accrocheurs comme dans le lisible 'Haters' pour ensuite être plus nerveux et obscurs, parfois presque hardcore ('Wasting My Time'). Les Français s'appuient surtout sur des refrains efficaces qui s'impriment facilement dans la mémoire ('The Smell Of The Blood', 'Our World Will Surely Stop').
Parlons de la relecture évoquée précédemment. Le jeu de la reprise est parfois un exercice d'équilibre précaire entre le respect de l’œuvre originale et l'appropriation personnelle qui risque de dénaturer la première version. Il n'y a en effet aucun intérêt de reprendre à la note près 'Wonderful Life' ou bien de le déstructurer quitte à envoyer valser la grande force émotionnelle de ce tube. Ici le constat est que Scarlean et Anneke s'en sortent avec les honneurs en noircissant le morceau avec l'apport de la juste puissance metallique, et une interprétation vocale duettiste qui n'en fait pas trop. La basse s'y veut vrombissante et les riffs de guitare restent tranchants sans trop être mis en avant.
Au casque, l'album prend encore plus d'envergure et de relief, laissant ainsi les arrangements venir à l'auditeur. Les pistes de chaque morceau sont nombreuses, notamment les claviers qui enrobent de leur noirceur 'A Lie To Remember' ou bien 'Treat Me Bad'. Le groupe possède une très belle maturité individuelle dans le chant puissant d'Alexandre qui livre une très belle prestation, les riffs de Geoffrey et Michel, la frappe précise d'Eric ou le groove de la basse d'Olivier. On sent ces individualités au diapason des compositions, proposant un bel équilibre entre chacun et non l'inverse.
A la fois moderne, frais mais sombre dans son ensemble, 'Soulmates' est un album varié et dans le même temps cohérent. Scarlean affiche une personnalité bien affirmée avec des influences bien digérées et intégrées au service de la recherche émotionnelle de chansons dans le sens noble du terme.