Fort d’un line-up remarquablement stable depuis sa création (hormis un changement de bassiste en 2014), Anubis nous livre son cinquième album original avec "Homeless". Dans un format plus ramassé que d’habitude (41 minutes, format vinyle oblige…), l’opus pose un regard sur la perception du monde en 2020 : accroissement des inégalités, dépendance aux technologies, populisme, préoccupations écologiques, aveuglement des politiciens…
Musicalement, Anubis s’éloigne de sa dimension purement progressive proche de Cosmograf, qui nous avait donné des morceaux souvent longs et savamment construits. Ici seul l’inaugural 'Reflective' garde une dimension prog marquée, avec variations de thème, plusieurs solos et changement d’ambiances (mais comment ose-t-on terminer un morceau de cette envergure par un indigne fade-out ?). Le reste des titres se dirige assez résolument vers un AOR sophistiqué aux colorations prog, mais garde un formatage assez standard : durée autour des cinq minutes, construction traditionnelle couplets-refrains / solo (court) et reprise. Le résultat est immédiatement accrocheur, parce que les Australiens ont le chic pour concocter des mélodies efficaces avec notamment des refrains choraux très accrocheurs, forcément porteurs en live ('White Ashes', 'Sirens'…). Par certains côtés, cette simplification raffinée tend vers l’univers d’Alan Parsons' Project ('Home'), avec le même soin dans la production, remarquablement claire.
La prise en mains de l’objet est donc des plus aisées : rien ne vient heurter la sensibilité de l’auditeur, les mélodies vocales sont prenantes, les solos de guitare courts mais bien conduits ('The Tables Have Turned', 'In Shadows', 'White Ashes'), les riffs point trop agressifs ('Homeless', plus rock), et l’ensemble se termine sur une note de quiétude douillette ('Gone'). Par contre l’exercice a ses limites : passées quelques écoutes, le plaisir s’émousse rapidement, et l’auditeur en vient à regretter les albums précédents qui avaient quand même beaucoup plus de profondeur musicale. En opérant un virage plus mainstream, Anubis est certes plus accessible mais il a perdu une partie de sa richesse musicale…