Solace Supplice, voilà un nom de groupe bien mystérieux derrière lequel se cachent Eric Bouillette et Anne-Claire Rallo, plus connus dans le (trop) petit monde du progressif made in France par le biais de leur groupe Nine Skies. Avec cette nouvelle entité, le couple sort de ses sentiers habituellement arpentés du rock progressif pour s'en aller baguenauder dans des contrées plus fréquentées, celles d'un rock pêchu chanté en français (on adore) que l'on pourrait inscrire dans la tradition des 90's. Pour accompagner cette nouvelle aventure, le duo a invité Jimmy Pallagrosi (ex-Karnataka, Zio, Hayley Griffiths Band…) à s'asseoir derrière les fûts, très certainement le meilleur choix quand on connaît les qualités de frappe et l'inventivité du bonhomme. Et histoire de rester en famille, c'est le surdoué Alexandre Lamia (Nine Skies) qui a assuré l'enregistrement de l'ensemble.
L'EP débute avec 'Les Miradors', titre qui va donner d'emblée la couleur des trop courtes 23 minutes qui le compose. La basse rythmique martèle un tempo furieux, soutenue par la frappe sèche truffée de contretemps de Jimmy Pallagrosi, tandis que le chant déclame des paroles sombres sur un ton relativement monocorde, doublé par des chœurs féminins sur les refrains. Immédiatement, les souvenirs du meilleur Noir Désir remontent en tête, l'agressivité en moins. Mais comme on ne renie pas ses origines, Solace Supplice ajoute un supplément d'âme à tout cela : petit break et solo de guitare par ci, touches aériennes de clavier par là, riff en arrière-plan, et voilà que d'un "simple" morceau rock on arrive à une musique beaucoup plus sophistiquée.
Et l'écoute de la suite va confirmer avec brio cette tendance. C'est particulièrement le cas sur 'Sunset Street' ou encore 'Schizophrénie Paranoïde' où le dosage entre les claviers et les guitares se révèle tout simplement parfait. La mise en place est subtile, rien n'est superflu et tout contribue à l'atmosphère sombre relatée par les textes magnifiques d'Anne-Claire Rallo.
De son côté 'Au Cirque des Âmes' va tout d'abord nous convier à une fête foraine dans laquelle violon et boîte à musique nous promènent pendant une grosse minute, avant que la basse, clavier et guitare ne se mettent en marche en installant des sonorités qui rappellent Ultravox, tandis que le chant désabusé continue de déclamer des paroles toujours aussi fortes. Dans un autre registre, plus intimiste mais tout aussi puissant, 'La Couche du Diable' risque d'en retourner plus d'un, entre un piano assurant un thème répétitif, et une guitare qui pleure ses riffs tant et plus.
Avec ce premier effort, Solace Supplice frappe très fort dans un domaine déjà bien fréquenté, mais en y ajoutant une touche personnelle issue de la longue expérience musicale de ses membres. Mariage parfait entre musique et textes intelligents, c'est une galette indispensable à découvrir de toute urgence.